A quels labels se fier pour choisir son chocolat ?

Fairtrade, Rainforest alliance, UTZ, Max Havelaar, Fair Direct Cacao, Equal Profit, Lindt & Sprüngli Farming Program, bio… autant d’appellations nébuleuses qui sont là pour vous convaincre d’acheter la conscience tranquille. Mais tous se valent-ils et à quels labels se fier pour choisir sont chocolat ?

Labels auto-décernés

Il ne vous viendrait pas à l’idée de croire mot pour mot un menu clamant « meilleure fondue du monde ». C’est pourtant ce que tentent de faire croire certains industriels, dont notamment Lindt, mais aussi le couverturier Felchlin, avec leur programmes internes de qualité. Si le mot label est rarement utilisé, les codes visuels sur leur tablettes et le vocabulaire sur leurs sites internet sont bien plus ambigus. Leur méthode est redoutable : le cacao est un filière corrompue où règne le travail des enfants, donc nous avons notre propre programme avec des standards bien supérieurs. Cette approche ne tient qu’au bon vouloir de leurs propres déclarations. Aujourd’hui, il est difficile de justifier son inaction de la sorte.

Les label indépendants

Une autre démarche consiste à faire appel à un label externe, indépendant. Plus saine, cette approche à l’avantage de reposer sur des critères plus transparents.

Deux éléments ternissent toutefois le tableau. Premièrement, rares sont les personnes qui comparent et évaluent les labels, surtout au moment de faire un achat. Ainsi, le site labelinfo.ch donne quelques détails intéressants à ce sujet, notamment sur la dimension sociale des exigences. Deuxièmement, le fonctionnement de ces labels est en grande partie assuré par les redevances des entreprises souhaitant se faire certifier. Dans le cas du label UTZ/Rainforest Alliance cela représente 62% du budget. Dans ces conditions, un label trop exigent serait boudé par les entreprises au profit d’un concurrent sérieux, mais moins exigeant. C’est pourquoi nombre de ces labels n’intègrent pas un prix minimum d’achat du cacao viable pour le producteur.

Le label UTZ s’applique notamment au cacao.

Ces labels présentent aussi la difficulté de se positionner dans des domaines différents. Max Havelaar plus sur l’aspect social, Rainforest Alliance/UTZ sur l’environnement… La question reste la même : à quels labels se fiers pour choisir son chocolat ? A ce stade, mon avis est qu’un de ces labels est un minimum et qu’un chocolat sans aucun label ne devrait même pas exister sur le marché.

Label sur la filière

Une autre façon de faire est de se concentrer sur la filière de production du chocolat. Ainsi, un chocolat artisanal, de commerce direct, bean-to-bar, tree-to-bar, farm-to-bar semble plus intéressant du fait que le producteur travaille en lien direct avec le planteur ou est carrément lui-même planteur. Nombre de marges laissées aux négociant disparaissent et le producteur est mieux rémunéré.

Le fait que ces dénominations ne soient pas réglementées pose de nombreux problèmes. Certains se disent artisans, alors qu’ils travaillent un chocolat de couverture dont ils ne connaissent presque rien. D’autres bean-to-bar passent par un sourceur de cacao. Ils se fient alors à un intermédiaire tant pour la qualité gustative que pour la traçabilité. Certains possèdent une plantation et y ont planté leur propres cacaoyers. Mais rien ne les empêche de mal rémunérer leurs ouvriers agricoles ou d’exploiter ces terres de façon illégitime.

A défaut de pouvoir tout contrôler, même les labels certifiant n’y parvenant pas, une possibilité est alors d’opter pour une certification de rémunération sur toute la filière. Ainsi Equalprofit cherche à imposer une rémunération proportionnelle entre tous les acteurs de la filière. Un modèle encore minoritaire, mais qui à l’audace d’aborder ouvertement la question de la rémunération.

Label sur le cacao

Se concentrer sur le cacao est une autre idée. Un cacao de qualité assure une meilleure rémunération, permet souvent de préserver la diversité génétique de l’espèce et met en valeur la culture locale. A minima, il y a le label bio, même s’il ne présage en rien de la qualité du cacao, ni de la rémunération des ouvriers agricoles. En effet, 90% des plantations de cacao sont de petites fermes familiales. Les labels bio coûtant très chers, ils sont obtenus au mieux par des coopératives ou par les grosses plantations.

Pour valoriser la diversité génétique du cacao, en 2012, la département de l’agriculture américain et l’association de l’industrie du chocolat fin se sont associé pour créer le Heirloom Cacao Preservation Fund (Fonds de préservation du patrimoine du cacao). Grâce au soutien scientifique du département américain, l’initiative permet d’identifier et de valoriser la variétés anciennes de cacao. Peu connue des consommateurs, cette démarche gagnerait à être valorisée. Certains producteurs mettent en avant la classification de leur cacao par ce fonds. C’est le cas par exemple du cacao utilisé dans cette tablette, bien que ce ne soit pas mentionné sur l’emballage.

Label sur la qualité du chocolat

Les International Chocolate Awards sont attribués chaque année par zone géographique et au niveau mondial.

Et les distinctions de qualité me direz-vous ? En effet, les chocolats peuvent être soumis au jury de différents concours, dont les deux plus connus au niveau international sont les International Chocolate Awards et les Academy of Chocolate Awards. La qualité va souvent de pair avec un cacao de qualité, donc cultivé dans de bonnes conditions. C’est donc un indicateur intéressant, mais qui ne vous indiquera au final pas grand chose. La tablette primée étant assurément artisanale — quoi que veuille dire le terme — et au goût du jury. Cela ne vous avancera guère en terme de préférences gustatives personnelles et de qualité du chocolat… Autant affiner votre palais en vous aidant de mon guide de dégustation et vous faire votre propre idée.

Et le prix dans tout ça ?

Trop souvent, ces différentes approches ne tiennent pas ou pas assez compte de la réalité des producteurs de cacao. En effet, même si on leur offre la possibilité de scolariser leurs enfants, de participer à la préservation de leur culture ou d’augmenter (pas assez) leurs revenus, ils ne parviennent pas à survivre. Leurs maigres revenus les bloquent bien en deçà du seuil de pauvreté. Cette problématique est très bien décrite par l’association VOICE, qui est une des rares à être indépendante.

Dès lors, la seule solution est de payer un prix juste pour le travail des producteurs. On estime qu’une tablette de 100 g ne peut être équitable si elle est payée moins de cinq francs (environ cinq euros)… Au final, c’est à nous, les consommateurs, de faire la différence, tant par rapport au prix payé qu’aux informations réclamées. Alors à vos tablettes !