Afficiao et Ekeko par Carrack Chocolat de Genève en Suisse

Chocolat Carrack Aficiao Ekeko
  • Fèves : trinitario et criollo (Aficiao) et Pure nacional (Ekeko)
  • Producteurs de cacao : Öko Caribe (Aficiao) et Don Fortunato (Ekeko)
  • Origine : Région de San Francisco en République dominicaine (Aficiao) et Vallée du Maranon au Pérou (Ekeko)
  • Torréfaction et conchage : inconnu
  • Récolte : 2020 (Aficiao) et 2021 (Ekeko)
  • Pourcentage : 75%

Notes de dégustation du chocolat Aficiao par Carrack Chocolat

La robe est foncée, tirant presque vers des accents anthracites. Chocolaté, le nez laisse transparaître quelques notes fruitées. La casse est nette tout comme le croquant. En bouche, les notes boisées ouvrent le bal, tirant vers les épices (réglisse, poivre, muscade). Suivent des impressions de noix, puis, plus gourmandes, de miel. La texture est dense, agréablement pâteuse, la langue s’y lovant avec plaisir. Les papilles sont nappées de chocolat. Agréable, la longueur joue plus sur la texture que les saveurs soulignant le côté gourmand de ce chocolat.

Notes de dégustation du chocolat Ekeko par Carrack Chocolat

La robe brun foncé est profonde. Le nez diffuse des notes fruitées et acidulées très nettes. La casse est franche, le croquant agréable. En bouche, les notes fruitées se confirment avec beaucoup de rondeur sur une trame légèrement boisée et cacaotée. Le chocolat a du caractère. La texture est fondante, sans trop en faire tirant presque vers le pâteux. La longueur donne un coup de fouet à l’intensité et révèle des notes de noix. Sur le long terme — les sensations procurées par ces fèves dure et dure —, des traces de torréfaction apparaissent, ainsi qu’un côté astringent.

Le petit plus : Le véritable intérêt consiste à comparer ces deux tablettes. Alternez, goûtez à nouveau et identifiez ce qui vous plaît dans chacune. L’exercice vous renseignera en détail sur vos préférences tant les deux créations sont différentes.

Chocolat Carrack Aficiao Ekeko
Les tablettes Aficiao et Ekeko de Carrack Chocolat, respectivement à gauche et à droite. Pas facile de discerner les nuances de leurs robes. Pourtant en bouche, le doute n’est plus permis.

Des fèves d’exception pour se lancer, le pari osé de Carrack

« Afficiao Ekeko Carrack Chocolat » sonne comme un incantation. De celles qui invoquent le chocolat pour mieux vous faire découvrir des fèves d’exception. En effet, derrière les tablettes de Carrack Chocolat se cache un duo ambitieux que j’ai eu la chance d’interviewer. Ces compères gourmands cherchent sans cesse à se dépasser. Une démarche parfaitement représentée par ces deux chocolats.

Le cacao d’Öko Caribe en République Dominicaine n’est plus à présenter. Ainsi, travaillé par les maîtres torréfacteurs les plus talentueux, il fait des merveilles, notamment chez Beaningful. De même, son profil aromatique riche en fait un excellent support pour les chocolatiers qui veulent affiner leur style en faisant ressortir des notes spécifiques.

Quant à lui, le cacao péruvien de la vallée du Maranon fait figure de légende. En effet, découvert en 2007 à relativement haute altitude, ces cacaoyers produisent la variété Pur Nacional que l’on croyait disparue. Particulièrement aromatique, ce cacao est aussi très délicat et demande une grande finesse lorsqu’il est travaillé. Rares sont ceux qui ont su exprimer son plein potentiel.

La note du sommelier
L'équilibre de ces tablettes est intéressant. Elles révèlent toutes deux une grande richesse gustative. Largement de quoi vous faire oublier les chocolats classiques. Toutefois, l'amateur averti connaissant ces fèves sait que leur potentiel peut être encore plus grand. De quoi se réjouir, car ces tablettes sont parmi les premières réalisées par Emile et Alain. C'est pourquoi j'ai hâte de pouvoir suivre leur évolution à l'aune de telle fèves. Que du bonheur !

Carrack chocolat, le nouveau bean-to-bar de Genève

Alain et Emile, les deux cofondateurs de Carrack Chocolat.

Carrack chocolat est la nouvelle chocolaterie bean-to-bar genevoise. Si la cité de Calvin peut se targuer de nombreuses boutiques de chocolat, côté production artisanale bean-to-bar c’est moins impressionnant. Certains artisans « classiques » s’y sont essayés avec plus ou moins de succès. D’autres, comme Ublossom, ont fermé. Le seul acteur crédible jusqu’à présent était Orfève. Avec l’arrivée de Carrack chocolat, la donne pourrait changer et le paysage cacaoté genevois s’enrichir. Tant mieux, car il existe un véritable marché pour fournir une alternative au chocolat de couverture et de masse. Pour vous, j’ai rencontré dans leur atelier les deux fondateurs, Emile Germiquet et Alain Chanson.

Carrack chocolat, pourquoi avoir orthographié autrement le carac, cette spécialité suisse au chocolat ?

Emile : A la base, nous voulions donner un autre nom à notre marque, mais il était déjà pris. Après de pas mal de réflexions, on a choisi carrack en référence au type de bateau à voile qui ramenaient les premières fèves de cacao des Amériques. Ce nom nous plaisait et en plus, il fait un clin d’œil à la pâtisserie.

Lors d'une dégustation chez Carrack chocolat, les fèves de cacao ne sont jamais loin.
Lors d’une dégustation chez Carrack chocolat, les fèves de cacao ne sont jamais loin.

Faut-il en conclure que vous êtes des spécialistes du cacao qui se lancent dans le chocolat ?

Emile : Non, pas du tout. Personnellement, j’ai travaillé dans de nombreux domaines et je gère aussi une agence de voyages. C’est d’ailleurs, comme ça que l’envie m’est venue. J’avais pour habitude d’offrir à mes clients du chocolat bean-to-bar pour adoucir leur retour. La curiosité m’a poussé à comprendre comment un aussi bon chocolat est fait. De fil en aiguille, je me suis dit pourquoi ne pas essayer moi-même.

Alain : Moi aussi, je ne viens pas du tout du monde du cacao, ni du chocolat. A la base, je suis menuisier. Ce qui m’a attiré dans ce projet, c’est la possibilité de travailler de façon créative tout en utilisant mes mains. On ne dirait pas de prime abord, mais faire du chocolat est un travail très demandant.

Comment avez-vous alors appris à faire du chocolat à partir de la fève, comment êtes vous devenus Carrack chocolat ?

Emile : Dans ma cuisine ! J’ai acheté du petit matériel pour faire des essais. C’est galère, mais quel plaisir ! Après ma compagne m’a gentiment fait comprendre qu’il ne serait pas possible de squatter la cuisine indéfiniment. Grâce aux conseils de Caroline et de François-Xavier [les fondateurs d’Orfève], j’ai pu comprendre comment me lancer plus sérieusement.

La souffleuse de coques de fèves de cacao réalisée par Carrack chocolat.
La souffleuse de coques de fèves de cacao construite par Carrack chocolat.

Alain : Pour ma part, c’est vraiment à force d’expérimenter et de tests. On a construit nous-mêmes ou adapté pas mal de nos outils. Comme j’aime bricoler, ça nous permet de réaliser ce dont nous avons exactement besoin. Par exemple, nous avons entièrement conçus la machine qui permet de séparer grâce à une souffleuse la fève torréfiée de son enveloppe. Alors que c’est souvent un élément qui limite la capacité de production des artisans, nous avons pu la dimensionner avec de la marge. Notre atelier est en grande partie pensé de cette façon.

A l’inverse de cette production « sur mesure », toutes vos tablettes de chocolat noir sont déclinées avec le même pourcentage de cacao. Pourquoi ?

Alain : C’est un choix délibéré de notre part. Notre objectif est de permettre à chacun de comparer les cacaos pour ce qu’ils sont : l’ingrédient principal du chocolat. Malgré un pourcentage similaire, chaque plaque a son caractère, sa particularité. La torréfaction et le conchage sont adaptés à chaque cacao, ce qui a gros impact sur le résultat final.

Emile Germiquet, cofondateur de Carrack chocolat.
Emile Germiquet, cofondateur de Carrack chocolat.

Emile : Lors des dégustations, les gens sont étonnés que les différences de saveurs ne sont dues qu’aux fèves et pas au pourcentage de cacao. Tout comme les cépages du vin, les variétés de cacao ont chacune leur caractère. Génétique, terroir, météo, fermentation influencent le potentiel gustatif des fèves. Notre travail consiste à découvrir ce potentiel et de le révéler dans les arômes et la complexité du chocolat. On pense que cette manière permet la meilleure comparaison. C’est aussi pour cette raison qu’on a directement créé des chocolats au lait, des pâtes à tartiner et des noisettes enrobées.

Carrack chocolat, aussi pour les plus jeunes alors ?

Emile : Oui, mais pas que ! Les grands aussi aiment la douceur.

Alain : Ça va au-delà du goût. J’aime que les gens puissent découvrir notre travail. On a même pris des jeunes en stage. Attention, c’est du sérieux. Pas pour passer la journée à regarder comment on travaille, mais pour réellement mettre la main à la pâte. C’est aussi une façon de permettre de découvrir le chocolat fait à partir de la fève.

Alain Chanson, cofondateur de Carrack chocolat.
Alain Chanson, cofondateur de Carrack chocolat.

Merci à Emile et Alain de m’avoir ouvert les portes de leur atelier et pour le temps qu’il m’ont offert pour découvrir leur travail… et le goûter ! On craque pour Carrack. Leur passion et leur transparence m’ont rappelé la rencontre avec Notes de Fève à Matran.

La note du sommelier
Ce qui m'a frappé chez Emile et Alain, c'est leur humilité et leur curiosité. Malgré leur planification minutieuse, ils n'hésitent pas à remettre en question leur travail. Grâce à cette approche, ils ont réussi ce qui est souvent le plus difficile à créer : leur propre style. C'est pourquoi je me réjouis particulièrement de voir comment leur travail va évoluer au fur et à mesure qu'ils vont approfondir leur savoir-faire.

Chocolat Quillabamba par Orfève de Genève en Suisse

Chocolat Quillabamba d'Orfève
  • Fèves : chuncho bio
  • Producteur de cacao : non-mentionné
  • Origine : province de La Convención, département de Cuzco, au centre du Pérou
  • Pourcentages : 70%
  • Transformation : torréfaction 43 minutes à 104°C et 72 heures de conchage
  • Millésimes : 2021 pour la torréfaction intense, inconnu pour l’autre

Notes de dégustation du chocolat Quillabamba d’Orfève

La robe entre le marron et le bistre est relativement claire. Le nez intense distille des notes de fruits secs et d’épices douces. La casse est relativement sonore pour une tablette fine et le croquant fuyant. En bouche, le fondant déploie une belle succession de notes intenses. Défilent des impressions de raisins secs, de noisette, puis un mélange d’épices rondes. La parade se termine par une pointe de myrtille, très légèrement tannique. La longueur est belle avec des notes de miel d’acacia, d’épices et une astringence maîtrisée. Le tout donne une impression intense et équilibrée.

Chocolat Quillabamba d'Orfève
La tablette de chocolat Quillabamba d’Orfève sait jouer avec les sens. Un délice.

Le petit plus : Si les jeux de lumière de la tablette sont captivants, pour profiter au mieux de la robe de ce chocolat, retournez-le. De même, en bouche, essayez-le en alternant les côtés lisse et texturé sur la langue. Qui a dit qu’on ne joue par avec la nourriture ?

Hommage au travail de l’artisan

Ce chocolat Quillabamba par Orfève est le parfait exemple de ce qui fait la qualité du travail artisanal. Des produits d’exception, ici les fèves chuncho, alliés une maîtrise du savoir-faire qui permet à l’artisan d’imprimer sa patte sur le produit final. Cette approche se traduit également par une grande transparence. Ainsi, Orfève indique non-seulement le type de fèves et leur origine, mais aussi comment elles ont été travaillées. S’il fallait pinailler, ne manque que la mention du producteur/sourceur et du prix payé pour le cacao.

Avec le temps, Orfève a su créer son style. Des premières tablettes qui mettaient l’accent sur l’intensité, leurs dernières créations ont gardé le caractère, tout en distillant avec finesse les saveurs les plus subtiles. Joli travail dont je me réjouis de continuer à suivre l’évolution.

Chocolat Quillabamba d'Orfève
Son plus grand défaut est aussi un avantage : une fois ouvert, le chocolat est difficile à remettre dans son emballage, la solution est de finir la tablette…

A titre de comparaison, ces mêmes fèves sont aussi interprétées par Qantu. La richesse sensorielle est similaire, mais le caractère de la tablette est complètement différent. Si vous avez l’occasion de comparer les deux chocolats, c’est un excellent moyen pour comprendre toute la valeur du travail des artisans et comment chacun exprime son style.

La note du sommelier
Le motif de la tablette subjugue les regards. Caroline et François-Xavier ont voulu ainsi faire un clin d’œil aux cadrans guillochés des montres genevoises qu'ils connaissent bien. Au-delà du visuel unique, loin des tendance vues et revues, c'est aussi et surtout une approche très intéressante d'un point de vue sensoriel. Preuve en est que le moule d'une tablette impacte également  la dégustation du chocolat.