Hacienda Limon Dark Milk Nibs par Laflor de Zurich en Suisse

Hacienda Limon Dark Milk Nibs Laflor
  • Fèves : nacional arriba
  • Producteurs de cacao : domaine unique géré par 12Tree
  • Origine : Quevedo, province de Cotopaxi en Équateur
  • Torréfaction et conchage : inconnus
  • Récolte : 2021
  • Pourcentage : 62%
  • Inclusions: lait et nibs de cacao

Notes de dégustation du chocolat Hacienda Limon Dark Milk Nibs par Laflor

D’un brun profond, la robe ne laisse pas deviner le chocolat au lait. Au nez, un je ne sais quoi lacté filtre entre les notes de brownie et de nibs de cacao. La casse est molle trahissant le lait. Le croquant est plus franc grâce aux nibs. En bouche, la texture friable déconcerte un peu. Une fois l’étonnement passé, les notes de nibs torréfiés se marient aux impressions gourmande de brownie, de caramel et une pointe furtive de banane. Le tout est très rond, malgré la touche acidulée des nibs. La longueur est équilibrée et révèle des accents de noisettes torréfiées. Aussi équilibré que gourmand, le chocolat ne demande qu’à être goûté à nouveau.

Le petit plus : Assumez le caractère régressif de la tablette et croquez dedans avec une tranche de tresse fraîchement sortie du four ou laissez en fondre un peu sur une crêpe… Promis, personne ne dira rien. Une expérience à réaliser aussi avec une tablette noire.

Hacienda Limon Dark Milk Nibs Laflor
Hacienda Limon Dark Milk Nibs Laflor, une tablette aussi élégante que gourmande.

Chocolat aux accents germanophones

L’atelier de production de Laflor est situé dans la périphérie de Zurich, au bord du lac éponyme. Loin de là, sur les pentes du volcan Cotopaxi en Équateur, la plantation de cacao est un interlocuteur de choix. En effet, outre le cacao de qualité, l’entreprise qui gère la cacaoculture appartient à des Allemands. Ils restaurent une plantation historique et fonctionnant en agroforesterie. Grâce à la langue commune, les échanges sont plus faciles et les producteurs zurichois subliment ces fèves. Hacienda Limon Dark Milk Nibs de Laflor, que du bonheur.

Le moule choisi pour les tablettes de Laflor ne laisse pas indifférent. D’une part il renforce leur côté élancé, élégant. D’autre part, en raison de la finesse de la tablette « au fond » des rainures, il rend le chocolat d’autant plus sensible à la fonte lorsque les températures augmentent. D’où sa casse très molle. Finalement, un chocolat aux propriétés idéales… hors saison chaude.

La note du sommelier
Ce chocolat tire sur la corde sensible de la gourmandise avec brio. Toutefois, autre récolte ou travail différent des fèves, une édition précédente m'avait bluffé par ses accents de banane aussi exotiques que saillants. Toutefois, le résultat était alors moins équilibré. Une différence dont je m’accommode volontiers, tant ce chocolat est "miam"...

Meksyk Soconusco El Vado par Beskid de Węgierska Górka en Pologne

Meksyk Soconusco Beskid
  • Fèves : criollo et trinitario
  • Producteurs de cacao : Finca La Rioja
  • Origine : municipalité de Tuzantán, dans l’Etat du Chiapas au Mexique
  • Conchage : 72 heures
  • Récolte : inconnue
  • Pourcentage : 70%

Notes de dégustation du chocolat Meksyk Soconusco El Vado par Beskid

La robe relativement claire tend vers le caramel. Le nez diffuse des notes de chocolat et de raisins de Corinthe. La casse est claire, mais sa sonorité presque en sourdine. Le croquant est cassant. En bouche, des notes épicées donnent le ton, suivie de ce je ne sais quoi de raisins secs. Des notes de miel de forêt tapissent la bouche avant que ne reviennent les épices et en particulier le poivre du Sichuan. La texture est grasse, malgré un chocolat qui reste relativement cassant. Belle, la longueur emplit la bouche distillant aussi des notes de noix. Un chocolat surprenant, presque parfois dérangeant, qui demande du temps.

Le petit plus : Mettez votre patience à l’épreuve en laissant le chocolat fondre en bouche, lentement… Ensuite, avec un autre morceau, essayez de le mâcher. Puis avec un troisième carré, tentez de mélanger les deux approches.

Meksyk Soconusco Beskid
Meksyk Soconusco Beskid, un chocolat au caractère bien trempé, qui a été récompensé d’une médaille de bronze en 2022 par l’Académie du Chocolat.

Des montagnes mexicaines aux reliefs polonais

Lorsque j’ai eu à choisir du chocolat dans l’assortiment de Beskid, l’origine des fèves a de suite capté mon attention. L’occasion rêvée de comparer avec ce que Taucherli fait ici en Suisse. Même pourcentage, même temps de conchage, pour un résultat sensiblement différent et ce malgré des points communs évidents. Difficile de dire si les nuances proviennent de la présence de trinitario dans les fèves ou d’un profil de torréfaction différent. Probablement un peu des deux.

Point intéressant, les fèves proviennent d’une région montagneuse du sud du Mexique et sont travaillées par une manufacture dans les montagnes du sud de la Pologne. Finalement, l’esprit montagnard des deux régions semble entrer en résonance et confère à la tablette un caractère affirmé.

La note du sommelier
Si le résultat est fort intéressant et mérite amplement la distinction reçue de l'Académie du chocolat en 2022. Je dois avouer rester un peu sur ma faim. Les cacaos du Chiapas offrent plus de potentiel et mériteraient un travail u peu plus ciselé dans le cas présent. Dommage également que le producteur ne mentionne pas plus d'information sur le millésime, la torréfaction et la rétribution du cacaoculteur.

Merci à Joanna pour la découverte.

Mexico Light Brown par Taucherli de Zurich en Suisse

Taucherli Mexico Porcelana Finca La Rioja
  • Fèves : criollo porcelana
  • Producteurs de cacao : Finca La Rioja
  • Origine : Cacahoatán, dans l’Etat du Chiapas au Mexique
  • Torréfaction et conchage : 23 minutes et 72 heures
  • Récolte : 2019
  • Pourcentage : 70%

Notes de dégustation du chocolat Mexico Light Brown par Taucherli

Gourmande, la robe tire presque au caramel. Le nez diffuse des notes de chocolat, de pain frais et de sésame. La casse est limpide, le croquant sonore. En bouche, les notes épicées ouvrent le bal sur un lit chocolat. Poivre, anis, cardamome. Le tout mêlé à des accents de feuilles de tabac et de fruits mûres. La texture a quelque chose de tannique, tout en étant très fluide. La longueur laisse en bouche cette impression texturée en y ajoutant des notes vertes de noix. Un chocolat élégant qui demande (avec bonheur) à être goûté plusieurs fois.

Le petit plus : Au lieu d’un carré, prenez une barre, mâchonnez-la et tentez d’identifier des notes de café moulu. Dans le doute, essayez avec un espresso, puis sans, puis le café seul et recommencez. L’exercice devient vite un jeu.

Taucherli Mexico Porcelana Finca La Rioja
La tablette de chocolat Taucherli Mexico Porcelana Finca La Rioja a une robe merveilleuse, brun clair avec des reflets entre l’acajou et le caramel.

Un chocolatier engagé

Avec ce Mexico, Taucherli démontre son savoir-faire et son engagement. Pionnier du mouvement bean-to-bar en Suisse, au fil des années, Kay Keusen a développé un style qui lui est propre. Une patte qui se retrouve au niveau du packaging et gustativement. Ses chocolats développent souvent des notes fruitées et épicées. Son engagement est aussi à souligner. Les tablettes proposées existent depuis des années, illustrant la solidité du lien avec ses producteurs. De même, l’entreprise s’engage de nombreuses causes sociales.

Outre son style unique, Taucherli se distingue par sa transparence : chaque tablette mentionne quantité d’informations et met en avant le producteur grâce à un QR-code. Si vraiment, sur l’emballage ne manquerait que plus de détails sur la torréfaction : température et durée. Un détail bien vite oublié, tant le reste est bien pensé.

La note du sommelier
Je dois avouer avoir un attrait pour les chocolats au cacao du Mexique. Une curiosité nourrie par ma première véritable expérience gustative bean-to-bar avec un chocolat espagnol dont les fèves venaient justement de cette même exploitation du Chiapas, La Rioja. L'interprétation et le millésime étaient complètement différents, distillant des notes particulièrement marquées de prunes et de double-crème. Un souvenir toujours vif.

Limited Edition de Standout Chocolate de Mölndal en Suède

Standout chocolate Limited Edition
  • Fèves : Piura Blanco (Piura Yahuanduz) et trinitario local (Kerta Semaya Samaniya)
  • Récolte : 2022 (Piura Yahuanduz) et 2021 (Kerta Semaya Samaniya)
  • Producteurs de cacao : coopérative Norandino de 3 fermes (Piura Yahuanduz) et Coopérative KSS (Kerta Semaya Samaniya)
  • Origine : région de Piura au Pérou (Piura Yahuanduz) et Bali en Indonésie (Kerta Semaya Samaniya)
  • Pourcentage : 70% chacun

Notes de dégustation du Piura Yahuanduz 2022 Limited edition de Standout Chocolate

La robe marron a des reflets d’acajou. Le nez très cacao distille la pointe d’acidité typique des Piura. La casse est franche et légère. Le croquant sonore. En bouche, la sensation soyeuse et élégante donne le ton. Les premières notes fruitées sont suivies d’impressions de noix, puis de fleurs et finalement de fruits blets. Impossible de tous les nommer tant il y en a. Le carnaval gustatif s’accompagne d’une sensation de force cristalline, parfaitement maîtrisée. Équilibrée, la finale joue la carte de la gourmandise. La longueur garde cette impression d’apothéose avant de décliner, très, très lentement, pour révéler un fort sentiment chocolaté pour le plus grand bonheur des papilles.

Standout chocolate Limited Edition
Limited Edition Standout chocolate, des bijoux qui feront le bonheur des papilles. A droite le Kerta Semaya Samaniya et à gauche le Piura Yahuanduz.

Notes de dégustation du Kerta Semaya Samaniya 2021 Limited edition de Standout Chocolate

La robe brun sombre joue tel un miroir. Le nez semble aussi profond que la robe avec des accents gourmands de noisette grillée. La casse est claire et audible, comme le croquant. En bouche, les notes de fruits rouges et de cerise se marient petit à petit avec des sensations boisées et de tabac, frôlant la réglisse. Le tout effectue une danse complexe et virevolte sur les papilles. Un je ne sais quoi de brownie sert de trame au tout pour ne rien ôter à la gourmandise de la tablette. La texture est légèrement plus lourde que celle du Piura, comme pour renforcer le côté régressif. Finalement, la longueur est belle, bien qu’un peu moins grandiose que celle du Piura.

Le petit plus : Écoutez l’ouverture de la 5e symphonie de Beethoven avec le piura. La musique résonne avec le chocolat. Quant au Bali, dégustez-le au coin du feu virtuel en fermant les yeux. Si l’expérience vous plaît, découvrez pourquoi.

Le bonheur des éditions limitées

Outre son style unique et sa maîtrise technique, Fredrik, le fondateur de Standout Chocolate, se renouvelle sans cesse. De ses débuts plus classiques, il garde la base de sa collection. Aujourd’hui, il enrichit régulièrement son catalogue de créations plus originales ou, comme dans le cas présent, d’éditions limitées. Découvrir ses nouveautés est toujours un plaisir.

Avec les fèves rares — seulement 16 sacs de 43 kilos pour ce Piura —, le travail ciselé du chocolat illustre tout le potentiel gustatif du cacao. Comme souvent, la comparaison permet de mieux comprendre le caractère unique de chaque tablette. Ainsi, pour le Bali, il est possible de se référer au travail de Frederik lui-même avec la récolte 2019 et de constater que ce millésime se rapproche plus de celui de 2020 interprétée par Encuentro. De même, pour le Piura, c’est avec les talents de Qantu et Orfève qu’il faut comparer. L’exercice révèle alors la qualité incroyable du cacao et le niveau exceptionnel pour révéler cette richesse gustative inégalée.

La note du sommelier
Fredrik fait partie de ces chocolatiers qui plutôt que d'être des artisans sont des artistes. Son interprétation magistrale de ces fèves confirme un talent rare. Le voir proposer des micros lots de fèves d'exception souligne le caractère éphémère de chaque création. Allant jusqu'au bout de sa démarche, il met ses producteurs de cacao en avant et propose des emballages 100% recyclable. S'il fallait mettre un petit bémol à toutes ces louanges, ce serait celui de ne pas (encore?) indiquer le prix d'achat de son cacao pour pousser vers de meilleures rémunérations dans la filière.

Ekwador + mleko i wanilia par Manufaktura Czekolady de Łomianki en Pologne

Chocolat au lait vanille par Manufaktura Czekolady en Pologne
  • Fèves : non-mentionnées
  • Producteurs de cacao : non-mentionné
  • Origine : Equateur
  • Pourcentage : 60%
  • Inclusions : lait et bâton de vanille

Notes de dégustation du chocolat Ekwador + mleko i wanilia par Manufaktura Czekolady de Pologne

La robe est d’un brun foncé intense, surtout pour un chocolat au lait. Ensuite, le nez libère des arômes gourmands de noix de coco grillée, légèrement soulignés par une impression lactée. La casse est relativement sourde, mais le croquant sonore. En bouche, la texture fondante ouvre le bal suivie de près par les notes gourmandes de cacao et de toffee au chocolat. La vanille est discrète, mais apporte clairement de la rondeur et lie le tout. Finalement, la longueur joue surtout sur la texture en recouvrant l’intérieur des joues. Elle distille une sensation caramel et cacao. Une création doucereuse improbable.

Le petit plus : Partagez ce chocolat avec plusieurs personnes, idéalement d’horizons et de cultures différentes. Ainsi, vous serez surpris de voir la palette d’impressions personnelles.

Chocolat au lait vanille par Manufaktura Czekolady en Pologne
Chocolat au lait vanille par Manufaktura Czekolady en Pologne.

Chocolat au lait vanille, quand les ingrédients s’assument

Les producteurs mentionnent rarement la vanille sur le devant de l’emballage, sauf lorsqu’elle joue le rôle d’une véritable inclusion. Généralement, les chocolatiers industriels l’utilisent pour masquer le goût des fèves de mauvaise qualité et/ou mal torréfiées. Dans ce cas, l’approche est tout autre. Le chocolat au lait vanille se revendique. Une approche qui gagnerait à se répandre et permettrait à cette épice merveilleuse d’occuper la place qu’elle mérite réellement dans l’univers du chocolat. Un exemple à suivre.

Finalement, ce dark milk à la vanille se pare de sensations mièvres, rappelant les milk shakes de l’enfance. Un univers que le producteur Manufaktura Czekolady semble évoquer volontiers. Cette approche de la production de chocolat pose une question intéressante : faut-il proposer, temporairement ou non, une gamme de chocolats moins « puristes » et plus orientée grand public ? Outre les enjeux financiers, il s’agît aussi de méthodes d’accompagnement pour proposer aux consommateurs des produits mettant de plus en plus en valeur le cacao.

La note du sommelier
Les palais amateurs de chocolats noirs ciselés vont probablement être déçus par cette création. L'impression globale tend vers un produit très sucré et manquant de finesse. Personnellement, cette tablette évoque quelque chose de plus ancien : une tarte polonaise faite de gaufrettes et nappée de chocolat. Le Torcik wedlowski. Un souvenir d'enfance auquel il est impossible de se raccrocher aux curieux qui le goûteraient aujourd'hui. Signe, s'il en est, que chaque producteur travaille dans son propre univers gustatif, composé d'héritages parfois impossible à transmettre au-delà pu public local. 

Chocolat Kefir et Porcini par Naive de Vilnius en Lituanie

Chocolats au Kefir et aux champignon de Naive en Lituanie
  • Fèves : mélange de fèves non-mentionnées
  • Producteurs de cacao : non-mentionné
  • Origine : non mentionnée
  • Pourcentage : 57% (kefir) et 62% (porcini)
  • Inclusions : lait en poudre et kéfir (kefir) et bolets (porcini)

Notes de dégustation du chocolat Kefir de Naive

La robe marron présente des accents caramels. Le nez chocolaté rappelle la fève de cacao séchée, acidulée. La casse est molle, comme insonorisée. Le croquant friable. En bouche, les notes de fèves de cacao acidulées s’accompagnent rapidement de celles du kéfir à la pointe alcaline. Le tout se mêle à une douce sensation de caramel maison. La texture pâteuse renforce ce côté pâte à tartiner gourmande. La finale maintient les notes sucrées, fruitées et acidulées du chocolat. La longueur tapisse bien la bouche, mais est un peu courte. Elle incite d’autant plus à réitérer l’expérience. Et la tablette disparaît sans bruit…

Chocolat au kefir par Naive de Lituanie
Chocolat au kéfir par Naive de Lituanie. Crédit photo: Dom Czekolady

Notes de dégustation du chocolat Porcini de Naive

La robe de par sa couleur et sa texture ressemble à un cuir aux reflets acajou. Le nez mêle la gourmandise du chocolat au lait avec des impressions de sous-bois et de noix. La casse est molle, tout comme le croquant. En bouche, les notes sylvestres ouvrent la marche, accompagnées d’un je ne sais quoi de noix, tendant jusqu’à la cacahuète. Le tout sur un fond de chocolat fruité qui rappelle les baies des bois. Les sens sont plongés dans l’exploration de cet univers très riche, quasi primal. Pour couronner le tout, la finale libère une sensation chocolatée et cacaotée. La longueur est belle, comme une senteur gourmande se dissipant dans une forêt. L’explorateur ne cherche qu’une chose : arpenter ces chemins à nouveau.

Chocolat porcini aux bolets par Naive de Lituanie
Chocolat « porcini » aux bolets par Naive de Lituanie. Crédit photo: Dom Czekolady

Le petit plus : Plutôt que de les marier aux habituels vins rouges aux notes de fruits rouges, tentez une expérience plus champêtre en goûtant ces deux tablettes avec du vin de cassis slovaque.

Le chocolat des chasseurs-cueilleurs lituaniens

En puisant dans l’imaginaire collectif lituanien nourri par la générosité ancestrale de la nature, le maître chocolatier Domantas Uzpalis de Naive convoque l’univers sensoriel des mythes fondateurs baltes. Un voyage initiatique entre forêt et campagne. Chocolat, kefir, porcini, Naive réussi avec ces accords à incarner l’esprit des foragers, les chasseurs cueilleurs en français.

L’originalité de Naive se retrouve aussi dans la forme improbable de leur « tablette ». Impossible à partager en morceaux égaux. Leur créativité se retrouve aussi dans leurs autres collections, par exemple avec leur chocolat citron-réglisse ou un dark milk au café. Seul bémol, même si le secret participe à la magie de l’ensemble, l’absence d’information quant à la provenance du cacao est un peu frustrante.

La note du sommelier
Cet univers si particulier mérite que l'on s'y plonge. Si un voyage en Lituanie reste un must, pour s'immerger dans l'imaginaire immémorial des chasseurs-cueilleurs des pays baltes, rien ne vaut la lecture de L'Homme qui savait la langue des serpents. Ce roman de l'Estonien Andrus Kivirähk vous transportera. Pour y ajouter la composante sonore, cette chanson lituanienne devrait parfaire le dispositif incantatoire :

Theobroma bicolor et grandiflorum: peut-on en faire du chocolat ?

Theobroma bicolor

Saviez-vous que le cacao a des cousins ? Theobroma biocolor et grandiflorum sont les plus connus. Si ces fruits tropicaux partagent une parentée commune avec le cacao, est-il alors possible d’en faire du chocolat et quel serait son goût ? Légalement ces produits ne peuvent pas être appelés chocolat, car ce dernier doit être composé de cacao, donc de theobroma cacao. Gustativement, c’est une autre histoire… A travers trois tablettes de producteurs différents, je vous propose de découvrir ces « chocolats » de Theobroma biocolor et grandiflorum. Une occasion rare pour découvrir des univers gustatifs complètement atypiques.

Tablette de chocolat aux inclusions de cupuaçu de Mission chocolate, Lion de Barbon (chocolat de Theobroma Bicolor) et Cupulate de la Brigaderie Paris (chocolat de Theobroma Grandiflorum)
De gauche à droite : tablette de chocolat classique aux inclusions de cupuaçu de Mission chocolate, Lion de Barbon (chocolat de Theobroma Bicolor) et Cupulate de la Brigaderie Paris (chocolat de Theobroma Grandiflorum).

Theobroma bicolor, le chocolat qui n’en était pas un

Aussi appelé mocambo, arbre jaguar, balamte ou pataxte, le theobroma bicolor est un fruit à l’apparence plus rustique que celle du cacao. Partie prenante des cultures précolombiennes, il était consommé et utilisé dans la cuisine. Les Européens semblent l’avoir moins apprécié et ne l’ont pas exporté massivement comme le cacao.

Aujourd’hui, certains artisans bean-to bar l’apprivoisent pour le transformer en tablette, à l’instar du cacao. C’est le cas de Barbon, à Montréal au Canada, avec son Lion 85% du Mexique. Une création à partir de theobroma bicolor, de sucre et de beurre de cacao comme un « chocolat » classique. Toutefois, la présence de vanille et de sapote rendent difficile de savoir quel serait le goût du bicolor seul.

Barbon Lion, chocolat de Theobroma bicolor
Notes de dégustation du Lion de Barbon
La robe est oscille entre le beige et le blond caramel. Le nez dégage une impression sucrée sur un lit de tourbe. Sensation improbable. La casse est molle, presque inaudible. Le croquant est un peu plus sonore. En bouche, les papilles sont perdues. Cette impression tourbée est toujours là, soulignée petit à petit par des notes de noisettes, de cajou et de noix du Brésil, dégageant une impression de crème de marrons. Le tout est très rond, sans âpreté, ni amertume ou acidité. Particulièrement doux. La texture est très grasse et le fondant lent, presque pâteux, contribuant à ce sentiment d'ovni gustatif. L’ensemble conserve une très belle longueur aux accents de gianduja. Inclassable, l'envie de goûter à nouveau taraude les papilles.

Theobroma grandiflorum, chocolat… ou pas

Un peu plus connu sous son autre nom de cupuaçu, le theobroma grandiflorum est un autre cousin comestible du cacao. D’apparence brunâtre, presque terne en comparaison des couleurs des cabosses de cacao, ce fruit est encore consommé dans plusieurs pays d’Amérique du Sud. Il reste pourtant méconnu sous nos latitudes. Une situation qui pourrait changer en raison de l’engouement pour les produits atypiques. En France, c’est la Brigaderie de Paris avec son cupulate — agglutinement de « cupuaçu » et « chocolate » — qui propose une interprétation du theobroma grandiflorum en tablette.

Brigaderie Paris Cupulate, chocolat de Theobroma grandiflorum
Notes de dégustation du Cupulate de la Brigaderie de Paris 
La robe marron aux accents acajou pourrait le faire passer pour un chocolat au lait. Au nez, le doute s'installe. Les notes épicées intenses vont titiller la curiosité des sens jusqu'au fond de la gorge. Le casse est très molle, complètement insonore, le croquant absent. En bouche, c'est l'explosion. Très fondante la tablette distille des notes de cuir, d'épices, de noix et un je ne sais quoi de fruité. Le tout dans un équilibre parfait sans surcharger les papilles, tout en les épatant. En trame de fond apparaît lentement une sensation d'intensité, qui fait écho à l'amertume du chocolat sans en être à proprement parler. La longueur distille du fruit et garde cette belle tension gustative. Magistral.

Point intéressant, seul du sucre vient relever le goût de cette tablette composée à 70% de cupuaçu. La richesse gustative provient donc uniquement du fruit. Preuve, s’il fallait, du potentiel gustatif des fruits originaires d’Amazonie

Chocolat aux inclusions de cupuaçu

Une autre approche consiste à inclure du cupuaçu à du chocolat classique. C’est une option choisie par la Brigaderie de Paris pour une autre de ses tablettes, mais aussi par Mission chocolate. Ce producteur bean-to-bar est situé à Sao Paulo au Brésil où le fruit fait partie de la culture.

Mission Chocolate, chocolat avec inclusion de cupuaçu
Notes de dégustation du Cupuaçu de Mission Chocolate
La robe brune est parsemée de morceaux de cupuaçu séché. Le nez est chocolaté avec un je ne sais quoi de fruit. Le casse est bridée par les morceaux de fruit et le croquant discret. En bouche, c'est d'abord l'intensité du chocolat qui frappe avant d'être rejointe par la sucrosité du fruit. Le chocolat apporte l'onctuosité de sa texture et gagne à se laisser fondre en bouche. La longueur est appréciable. Une approche beaucoup plus classique, mais aussi beaucoup plus facile à aborder.

Cette interprétation des inclusions de cupuaçu rappelle celle du cascara par Baiani, autre producteur brésilien, mais avec plus de talent. L’équilibre entre le chocolat et les inclusions est meilleur. Toutefois, l’accord entre les deux produits reste quelque peu en deçà des deux autres tablettes en terme de richesse gustative. Cacao et cupuaçu coexistent harmonieusement sans pour autant se sublimer l’un l’autre.

Hybridation de theobroma pour des chocolats uniques

La proximité des fruits des différents theobroma permet aussi d’expérimenter d’autres démarches, comme l’hybridation des arbres de cacaoyer avec leurs cousins. Ces croisements sont probablement à l’origine des fèves sauvages utilisées par exemple par Qantu pour réaliser son incroyable Trésor caché. Une autre possibilité consiste à mélanger les fèves de cacao avec celles d’autres theobroma. Une solution également explorée par Barbon dont je vous partagerai prochainement le résultat.

Reste une question en suspens : ces créations atypiques valent-elles la peine ? Que ce soit le theobroma bicolor ou grandiflorum, leurs « chocolats » sortent des sentiers battus. A ce titre, il sont un must pour tout curieux. Personnellement, il y a fort à parier que mes papilles se laissent à nouveau tenter par l’expérience. Toutefois, ces produits restent rares et risquent de décevoir ceux qui cherchent à répondre à une pulsion gourmande et régressive. Heureusement, dans ce domaine, theobroma cacao s’en sort très bien.

Smith & Smith par Taucherli de Zurich en Suisse

Chocolat Taucherli Smith & Smith
  • Fèves : criollo indigène
  • Producteurs de cacao : Cacao Betulia
  • Origine : Hacienda Betulia, département d’Antioquia au nord de la Colombie
  • Torréfaction et conchage : 25 minutes et 65 heures
  • Récolte : 2020
  • Pourcentage : 65%

Notes de dégustation du chocolat Smith & Smith par Taucherli

Semblable aux autres créations avec du cacao Betulia, la robe se distingue par son teint clair, marron. Le nez est discret, presque mystérieux. La casse est claire, le croquant franc. En bouche, le fondant dévoile de suite quelque chose d’atypique : des notes suaves et fruitées du raisin transformé en vin. Le tout soutenu par une trame épicée. Suives des notes de noisette et de chocolat. La texture prend le dessus sur les saveurs, laissant toute la place au cacao. La longueur offre une nouvelle respiration aux accents fruités et vineux, bien que le cacao les talonne. Une belle création qui laisse un goût d’inachevé.

Le petit plus : Marriez ce chocolat à une gorgée de vin blanc, par exemple un assemblage comme le Staatsschreiber Cuvée Blanc Prestige de Zurich, qui fera ressortir le côté fruité et bonifiera tant le vin que le chocolat.

Chocolat Taucherli Smith & Smith
Le chocolat Smith & Smith de Taucherli présente une robe claire caractéristique des cacaos Betulia.

Chocolat et vin, une tendance durable ?

Taucherli explore le monde des accords gustatifs avec le sommelier zurichois Smith & Smith. Dans ce cas, les partenaires proposent de marier ce chocolat à un prosecco de Vénétie, le Nudo. Une collaboration intéressante pour illustrer concrètement comment accorder deux produits. A noter, que le chocolat Smith & Smith Taucherli ne comporte aucun élément lié directement au vin, si ce n’est son profil gustatif

Si vin rouge et chocolat noir semblent souvent associés dans l’imaginaire collectif, il est souvent plus facile d’unir un blanc à une tablette noire, comme le montre la proposition zurichoise. Point intéressant, nombre de ces explorations émanent souvent de régions moins réputées pour leur production viticole, à l’instar de cette tablette polonaise. Les fers-de-lance du vin seraient-ils trop conservateurs ?

Cette tablette est aussi l’occasion de goûter des fèves B8 de Betulia et de les comparer avec les variétés B6 et B9. Un exercice qui en vaut la peine en lui-même et qui, de par le caractère vineux de ces fèves, a inspiré cet échange à Taucherli.

La note du sommelier
Dommage que la collaboration ne soit pas mieux mise en avant. Si le type de vin est indiqué sur l'emballage, rien n'est dit sur le choix du vin ou la méthode utilisée pour trouver l'accord. Si le Prosecco trouve son public de chaque côté des Alpes, vu la collaboration zuricho-zurichoise, personnellement j'aurais trouvé plus intéressant d'aller au bout de la démarche en travaillant avec un vin du cru comme je le propose ci-dessus. Cette réticence pour les flacons locaux semble bien ancrée dans la métropole zurichoise dont les faveurs vont plus volontiers aux vins du sud ou du Valais.

Chocolat Cabernet par Manufaktura Czekolady de Łomianki en Pologne

Chocolat Cabernet par Manufaktura Czekolady en Pologne
  • Fèves : non-mentionnées
  • Producteurs de cacao : non-mentionné
  • Origine : non-mentionnée
  • Pourcentage : 63%
  • Inclusions : peaux séchées et pépins de raisins polonais

Notes de dégustation du chocolat Cabernet par Manufaktura Czekolady de Pologne

La robe est sombre, brun foncé. Le nez distille clairement des notes épicées de noix de muscade et de poivre de Jamaïque. La casse est claire, tout comme le croquant. En bouche, les notes de bananes et d’épices ouvrent le bal. Suit le goût caractéristique des pépins de raisins, qui se marie parfaitement à l’ensemble. L’impression chocolatée sert de trame à l’ensemble. La texture cassante prend petit à petit de l’ampleur et renforce le sentiment d’un vin rouge léger que donne la tablette. Elle donne du corps au chocolat. La finale diffuse une sensation de fruits rouges, légèrement acidulés, presque d’airelles. La longueur est lisse et recouvre particulièrement la langue, laissant une impression presque tannique. Bien plus tard, ce sont des notes de caramel qui ressortent. Une tablette inclassable.

Le petit plus : Goûtez un carré ou deux avant le repas, à l’heure de l’apéro, avec un mini-bretzel salé. Ensuite, réitérez l’expérience en fin de repas avec un bleu léger. Qui a dit que le chocolat ne pouvait pas remplacer le vin ?

Chocolat Cabernet par Manufaktura Czekolady en Pologne
Chocolat Cabernet par Manufaktura Czekolady… en Pologne ! Un chocolat aussi improbable qu’intéressant.

Un chocolat qui surprend

Saviez-vous que la Pologne produit du chocolat et du raisin ? Effectivement, il y a de quoi être surpris. Si le cacao vient d’ailleurs, le raisin est local. Il semblerait que les pépins et les peaux de raisins soient ajoutés aux fèves de cacao lors du broyage. C’est pourquoi le raisin imprègne directement la masse ainsi produite. Ainsi, pour cette création, Manufaktura Czekolady utilise trois cépages différents poussant en Pologne. Vu son nom, il est raisonnable d’espérer que ce chocolat cabernet en contienne.

Malheureusement, le producteur ne fournit pas plus d’information sur les fèves ou les raisins. Comme par exemple, d’où vient le raisin et ou comment a débuté la collaboration avec le caviste mentionné sur l’emballage. L’opportunité manquée de raconter une histoire hors du commun.

Si le sujet vous intéresse, je vous recommande mon article sur la dégustation vin et chocolat.

La note du sommelier
C'est la curiosité qui m'a poussé à goûter cet ovni chocolaté. Un choix que je ne regrette absolument pas. Une fois encore, grâce à leur approche décomplexée, les producteurs des pays sans tradition chocolatée, et encore moins viticole, osent casser les codes. Ils expérimentent et ça fait du bien. Certes, ce genre de curiosité apporte aussi parfois sont lot de déceptions, mais pas cette fois.

Olé d’avoine et Rêves de cachemire par Qantu

Chocolats Olé d'avoine et Rêves de cachemire de Qantu
  • Fèves : non-mentionné
  • Producteur de cacao : non-mentionné
  • Origine : Pérou
  • Pourcentage : 50% (Olé d’avoine) et 55% (Rêves de cachemire)
  • Inclusion : sucre d’érable et poudre d’avoine 50% (Olé d’avoine) et lait de chèvre (Rêves de cachemire)

Notes de dégustation du chocolat Olé d’avoine de Qantu

La robe est celle d’un chocolat noir léger, d’un joli brun. Quant à lui, le nez trahit la présence de l’avoine avec ses notes suaves de petit-déjeuner. La casse est sourde et le croquant net. En bouche, les mêmes sensations matinales gourmandes reviennent. A y regarder de plus près, le chocolat distille d’autres notes. Quelque chose de la citrouille butternut mêlé d’épices évanescentes avec une pointe de noix de pécan. Une symphonie automnales qui renforce le côté « à manger dans un moment de cocooning ». La longueur relance le sentiment d’avoine et de chocolat. Belle, elle vient mourir lentement sur les papilles.

Notes de dégustation du chocolat Rêves de cachemire de Qantu

La robe marron pourrait passer pour celle d’un chocolat noir. Le nez ne laisse pas de doute. Après une impression chocolatée, le caractère caprin est bien présent. La casse et le croquant sont mous comme ceux d’un chocolat au lait. En bouche, c’est le fondant très caramel qui ouvre le bal. Le caractère affirmé du lait de chèvre qui suit, transporte les papilles dans un autre univers, celui des fromages affinés. Pourtant au-delà des ingrédients, transparaît quelque chose de fruité, suranné, tirant vers la confiture de poires Abate bien mûres. En finale, ce sentiment est rehaussé par un je ne sais quoi de miel de fleur. Un voyage sensoriel unique.

Le petit plus : Oserez-vous commencer votre journée par ces chocolats ? Que vous soyez plutôt petit-déjeuner bol d’avoine ou brunch avec du chèvre frais, tentez l’expérience Qantu. A jeun, comme un remède. Les sens sont d’autant plus aux aguets et le plaisir décuplé.

Chocolats Olé d'avoine et Rêves de cachemire de Qantu
Deux chocolats qui semblent être au lait, pourtant qu’un seul l’est réellement: Rêves de cachemire, car Olé d’avoine est légalement un chocolat noir.

Le chocolat au lait autrement

Avoine, cachemire, Qantu sort des sentiers battus pour interpréter le chocolat au lait autrement. Si le lait d’avoine est tendance et le lait de chèvre gourmand, c’est surtout leur approche qui fait la différence. Elfi et Maxime ont mis dans ces deux tablettes tout leur cœur et leur univers. Le résultat est un moment de douceur qui sent bon le petit-déjeuner tardif, un week-end d’automne. Même gourmands, ces chocolats jouent sur des notes tout en finesse. De quoi satisfaire tout le monde et de sortir du cliché des « autres » laits sans intérêt.

La note du sommelier
Si l'interprétation de ces accords lactés est réussie, l'amateur des bons cacaos que je suis reste un peu sur sa faim. Les origines et les types de fèves ne sont pas mentionnés. Certes, ce n'est pas le but de l'exercice, mais pour les fadas de cacaos comme moi, c'est comme le mucilage qui habille la fève : la touche qui fait la différence. A noter aussi le soin habituel apporté à la personnalisation de l'emballage avec les dessins reconnaissables entre mille qui font la touche Qantu.