Rwenzori Ouganda par La Fèverie Hasnaâ de Bordeaux en France

La Fèverie Hasnaa tablette de chocolat Rwenzori Ouganda 75%
  • Fèves : variétés de Trinitario historique et Upper Amazon, bio, fermentées entre 5,5 et 6,5 jours, séchées au soleil.
  • Producteur de cacao : inconnu seul est mentionné le sourceur, Cacao Latitudes, qui ne présente pas ses producteurs.
  • Origine : région de Rwenzururu à 900m d’altitude, près de la frontière du Congo, en Ouganda
  • Pourcentage : 75%
  • Millésime : 2020 (récolte mars-avril)

Notes de dégustation

Élégante de par son moulage ondulé, la tablette présente une robe brun sombre aux accents chocolat. Au nez, des notes de fruits rouge et de cacao se dégagent. La casse est franche et sèche. En bouche, la texture est presque un peu trop friable avant de laisser place au fondant qui, d’un coup, transcende le cacao pour révéler ses saveurs. Cerise, réglisse, une note volcanique et une pointe de cannelle. Aussi inattendu qu’intense. Vient ensuite une sensation de puissance associée à l’astringence du cacao, sans que ce ne soit de trop. Pas étonnant qu’un lion figure sur l’emballage de ce chocolat puissant et majestueux. Il ravira les amateurs de sensations brutes et risque d’être moins apprécié par les amateurs de douceur et de retenue.

Le petit plus : Croquez et mâchez un morceau jusqu’à en faire une pâte grossière en bouche avant de laisser le tout fondre lentement. C’est ainsi que s’exprimera au mieux sa richesse gustative. Et pour le dompter, associez-le à un peu de brioche.

La Fèverie Hasnaa tablette de chocolat Rwenzori Ouganda 75%
Tablette de chocolat Rwenzori Ouganda 75% par La Fèverie Hasnaâ

Mais encore… le chocolat Rwenzori par La Fèverie Hasnaâ de Bordeaux

Parmi les porte-étendards du renouveau du bean-to-bar en France, Hasnaâ a lancé La Fèvrerie en 2014. Cette ancienneté relative lui permet de proposer un concept particulièrement abouti pour ses tablettes : emballage entièrement recyclable, excellente mise en avant des fèves grâce à une fiche explicative détaillée, mention du sourceur, etc. Pour les curieux dont je suis, dommage qu’il ne soit pas fait mention des informations sur la torréfaction, simplement décrite comme longue.

Cette tablette de chocolat Rwenzori d’Ouganda par la Fèverie est particulièrement intéressante gustativement. Loin du bean-to-bar qui, souvent par opposition aux tablettes industrielles intenses, joue la carte de la retenue, cette création montre comment l’intensité peut être ciselée. Un choix certainement plus clivant, mais qui illustre la richesse de la palette du chocolat. Le tout avec un pourcentage de cacao au final pas si élevé, témoignage de la prévalence du travail de la fève.

Bali Jembrana 70% par Encuentro de Lille en France

Chocolat 70% Bali Jembrana par Encuentro de Lille en France
  • Fèves : variété locale de Trinitario bio
  • Producteur de cacao : coopérative Kerta Semaya Samaniya
  • Origine : région de Jembrana à l’ouest de Bali en Indonésie
  • Pourcentage : 70%
  • Millésime : 2020

Notes de dégustation

Avec ses carrés bien alignés, la tablette au brun tirant presque vers l’anthracite semble bien foncée pour un noir classique. Au nez, des notes boisées et de fruits bien mûrs se mêlent déjà. La casse est ferme et presque sourde. En bouche, ce sont d’abord les notes boisées qui se révèlent, suivies d’une touche chocolatée, puis légèrement épicée, avant de donner une impression de poire abatte et de mirabelle en train d’être cuites pour en faire une confiture. Pour conclure, c’est une sensation de miel de lavande qui tapisse la langue et caractérise aussi la longueur en bouche très plaisante. Fortement sollicitées, les papilles découvrent ce chocolat complexe avec beaucoup de plaisir.

Le petit plus : C’est en le laissant fondre lentement que ce chocolat révèle toute sa complexité. Ne vous laissez pas déstabiliser par son côté insaisissable et prenez le temps de le goûter plusieurs fois. Goûté rapidement une nouvelle fois, il donne l’impression d’un je-ne-sais-quoi de pain d’épice allemand. Insaisissable jusqu’au bout ! Même avec l’aide de la roue de saveurs.

Chocolat 70% Bali Jembrana par Encuentro de Lille en France
Chocolat 70% Bali Jembrana par Encuentro de Lille en France

Mais encore… le chocolat Encuentro qui réunit Bali et la France

Comme souvent, c’est d’abord avec les yeux que l’on choisi une tablette. Ce chocolat Bali Jembrana par Encuentro ne fait pas exception. Le dessin de la cabosse, la texture agréable du papier et la mention du millésime et du producteur de cacao m’ont convaincu de tenter l’aventure. La découverte qui en a suivi a été à la hauteur de la promesse visuelle. Encuentro fait preuve d’une rare transparence. Par exemple, ils mentionnent leurs sourceurs de cacao lorsqu’ils ne travaillent pas en contact direct avec les producteurs ou expliquent encore leur démarche en terme de packaging. Bravo !

Cet engagement se concrétise également dans les tablettes. Ainsi, c’est la rencontre avec un intermédiaire en France qui leur a donné envie de travailler avec ce cacao balinais aussi complexe que rare. La preuve que producteur de cacao et producteur de chocolat peuvent travailler de concert et nous faire découvrir des terroirs inattendus.

Wild Orange & Lemon Poppy par Terroir Chocolate à Fergus Falls (MN) aux USA

Terroir Chocolate lemon poppy et wild orange
  • Cacao : non spécifié
  • Inclusions : huile essentielle d’orange pour le noir et graines de pavot et huile essentielle de citron pour le blanc
  • Pourcentage : 70% pour le noir et non spécifié pour le blanc

Notes de dégustation

Wild Orange : Très sombre pour un 70%, la tablette sent bon le chocolat avec seulement une pointe orangée. En bouche, l’orange prend de suite le relais, sans que le chocolat intense ne soit en reste. L’équilibre fonctionne. Une impression gourmande de bonbon envahit les papilles et se distille de façon linéaire. Un peu court, on en redemande et la tablette disparaît très vite… Le cacao mériterait d’être travaillé avec plus de finesse et avec une torréfaction moins intense pour mieux compléter l’orange.

Lemon Poppy : Avec ses petits carrés constellés de graines de pavot, la tablette ne demande qu’à être goûtée ! Au nez, le citron se laisse deviner. Sur la langue, l’onctuosité du beurre de cacao distille petit à petit les notes de citron et finalement le pavot vient clore la marche avec, étonnement, beaucoup de douceur. Les grains savent se faire discrets en terme de texture, peut-être un peu trop pour ceux qui apprécient leur croquant.

Mais encore… Wild Orange & Lemon Poppy par Terroir Chocolate

Le mouvement bean-to-bar est particulièrement développé aux États-Unis et il n’est pas rare de trouver des chocolatiers loin des grandes métropoles, comme ici dans le Minnesota dans ce qu’il convient d’appeler « au milieu de nulle part ». Ainsi, la richesse de cet écosystème chocolaté permet d’y rencontrer des pépites, mais aussi d’y trouver des produits plus « simples ». Ces deux tablettes en sont une excellente illustration : sans prise de tête, sans grandes prétentions, elles remplissent à merveille leur mission qui est de satisfaire la gourmandise. Reste peut être le nom mêlé de français de la marque, Terroir Chocolate, qui se veut plus chic qu’il ne l’est réellement. Finalement, des chocolats régressifs qui permettent d’éviter de devoir recourir aux produits des industriels tout en étant labellisés bio, alors pourquoi pas ?

Bord de Mer, chocolat aux algues, par Terre de fèves de Vannes en France

Bord de mer, chocolat aux algues Terre de Fèves
  • Fèves : variété locale Mankuva (hybride Trinitario et Forestero), bio
  • Producteur de cacao : non mentionné
  • Origine : état du Kerala en Inde
  • Pourcentage : 75%
  • Inclusion : algues séchées (aonori et laitue de mer)

Notes de dégustation

La tablette fait déjà de l’œil à travers la fenêtre de son emballage. Le vert intense des algues séchées ressort bien sur la robe foncée du chocolat et attire le regard. A y regarder de plus près on distingue la fleur de sel qui joue avec la lumière. Au nez, le chocolat interpelle et un je ne sais quoi marin transparaît en filigrane. La casse est nette. En bouche, plus de doute, c’est un ovni gustatif. Les algues se mêlent instantanément aux saveurs chocolatées. Les algues apportent des notes de matcha et quelque chose de légèrement iodé, tandis que le chocolat relève le goût avec ses saveurs épicées exaltées par la fleur de sel. Le tout avec un savant équilibre. Le longueur est belle et conserve la rondeur qu’apportent les algues. Très probablement un des chocolats les plus umami que j’aie goûté.

Le petit plus : Comparez l’expérience en laissant fondre la chocolat, puis en le croquant. Cette dernière approche a ma préférence. Les saveurs semblent plus harmonieuses. Côté cuisine, oserez-vous en faire fondre un peu sur une crêpe bretonne ? On en oublierait le caramel au beurre salé…

Bord de mer, chocolat aux algues Terre de Fèves
Bord de mer, chocolat aux algues par Terre de Fèves à Vannes en Bretagne

Mais encore… le chocolat aux algues breton

C’est à l’occasion de vacances en Bretagne que j’ai pu découvrir le travail d’Anne-Laure dans sa boutique-atelier Terre de fèves de Vannes. Une belle rencontre qui n’a fait que confirmer ce que ses chocolats illustrent : un travail pointu et engagé ! Tout y est : les emballages à base cacao recyclé et compostable, la recherche constante pour améliorer le travail des fèves et surtout la passion. Un travail d’autant plus admirable vu la relative jeunesse de la manufacture et la richesse de son assortiment. C’est assurément une chocolatière à suivre, car son travail ne fera que de gagner encore plus en valeur avec le temps.

D’un point de vue créatif, ce chocolat aux algues reflètent une approche intéressante qui valorise un terroir, la Bretagne, sans tomber dans le cliché facile, p.ex. avec du caramel. Cette tablette porte particulièrement bien son nom de Bord de mer.

Le saviez-vous ? Si les algues étaient consommées en période de disette, elles sont aujourd'hui intégrées à la gastronomie bretonne comme en témoigne le site de l'office du tourisme. Au Japon, les algues aonori font partie de la culture culinaire depuis longtemps. Si vous êtes fan de soupe miso, de nombreuses recettes traditionnelle incorporent cette algue. 

Palo Santo par Qantu de Montréal au Canada

Chocolat palo santo de Qantu
  • Fèves : variété locale, le Bagua
  • Producteur de cacao : non mentionné
  • Origine : province de Bagua, dans la région d’Amazonas au Pérou
  • Pourcentage : 70%
  • Inclusion : fumée de bois palo santo

Notes de dégustation

La robe est d’un beau bistre foncé, chatoyant. C’est au nez que ce chocolat se dévoile : un parfum de bois fumé, chaud, relevé d’une touche de cacao. Inclassable. La casse est franche, presque cassante. En bouche, la présence du palo santo est immédiate. Ce goût, mêlé à la texture du chocolat, rappelle l’expérience d’un lapsang souchong, plutôt rond. Le tout parsemé de notes furtives d’agrumes et d’un je ne sais quoi de bergamote qui tire sur l’Earl Grey. Définitivement un chocolat aux accents de five o’clock tea. Le chocolat emplit bien la bouche La longueur en bouche est particulièrement belle, planante.

Le petit plus : Le palo santo de Qantu fera des merveilles à l’heure du goûter, de préférence après un longue balade d’automne en forêt. Ajoutez y une tranche de brioche ou mieux de panettone et le bonheur sera total. Mais surtout prenez le temps…

Chocolat palo santo de Qantu
La tablette de chocolat de Qantu et un morceau de palo santo.

Mais encore… à propos du palo santo et de Qantu

Souvent, lorsqu’un chocolat propose des inclusions avec des produits venant de la région où pousse le cacao, la créativité semble se perdre. Ainsi les cacaos malgaches sont souvent mariés à la vanille locale et les cacaos mexicains au piment. Même si ces associations fonctionnent, elles restent assez convenues. Grâce à Qantu, il est possible de sortir des sentiers battus.

Le palo santo — littéralement le bâton saint ou sacré — est un arbre et n’est pas vraiment connu pour ses vertus gustatives… Pourtant, les souvenirs de la cofondatrice de Qantu, Elfi, l’ont guidée.

« Ma mère priait chaque vendredi en même temps qu’elle brûlait quelques bâtons de Palo Santo et dont l’arôme nous donnais une paix immédiate inexplicable. Un arôme de fleurs, d’agrumes et d’épices qui nous annonçait que c’était le moment de remercier la vie pour être en famille et en bonne santé. »

Elfi Maldonado, cofondatrice de Qantu

Pour en savoir plus sur l’influence des émotions sur la perception du goût, c’est ici.

Outre le fait que le palo santo et le chocolat se marient à merveille pour recréer un expérience forte, c’est aussi une performance technique. Même si le chocolat capture facilement les odeurs, l’exercice n’est pas évident. Premièrement, il s’agît de produire des tablettes au goût constant en travaillant avec… de la fumée ! Deuxièmement, le défi consiste à trouver le bon équilibre. Le palo santo ne ne doit pas prendre le dessus sur le chocolat. Qantu maîtrise le tout avec brio.

Le saviez-vous ? Le palo santo que Qantu utilise provient du nord du Pérou, de la forêt sèche de Dotor dans la région de Piura. C'est dans cette même région de Piura que Qantu se fournit en fèves de cacao pour plusieurs autres de ses tablettes. Cerise sur le gâteau, Qantu reverse une partie du prix de la tablette directement à la communauté qui entretient cette forêt

100% & Nibs Fazenda Sempre Firme et 75% Black Pepper Bejofo Estate par Åkesson de Londres au Royaume-Uni

Chocolat Akesson 100% nibs et 75% black pepper
  • Fèves : forastero brésiliennes pour le 100% et trinitario malgache pour le 75%
  • Producteur de cacao : Åkesson
  • Origine : état de Bahia au Brésil pour le 100% et Bejofo, à Madagascar pour le 75%
  • Pourcentage : 100% (dont 7% de nibs) et 75%
  • Inclusions : nibs de cacao pour le 100% et poivre noir de la même plantation pour le 75%

Notes de dégustation des chocolats Akesson

100% & éclats de cacao : La robe couleur ébène reste étonnamment claire pour un 100% à base de forastero. Le nez intense est envoûtant avec des notes de cacao en poudre et de chocolat. La casse est franche. En bouche, astringence frappe les papille et monte crescendo sans pour autant en faire trop Les nibs se révèlent au fur et à mesure que le chocolat fond et apportent une touche de douceur en plus de leur croquant. Mâché, le chocolat révèlent plus d’arômes : brownies, pointe de cassis, noisettes grillées. Un exercice intense pour les papilles, mais qui confère un je ne sais quoi de gourmand à ce 100%… étonnant ! La longueur en bouche est belle et garde cet équilibre jusqu’au bout.

75% & poivre noir : La couleur chocolat est vite trahie par le nez poivré de cette tablette. La casse est plus ronde. Sur la langue, le poivre prend rapidement ses aises et apporte ses notes typiques fraîches, presque mentholées, et piquantes, mais sans excès. La touche sucrée, chocolatées entre en scène dans un deuxième temps. Une fois encore, c’est mâché, plutôt que laissé à fondre, que le chocolat est le plus équilibré. Le poivre reste longtemps en bouche, peut-être un peu plus que le chocolat, sans tomber dans l’excès. La longueur joue agréablement entre notes fraîches et douce chaleur du poivre sur le palais.

25% de cacao et une touche de poivre séparent ces deux tablettes de chocolat d’Akesson

Mais encore… à propos d’Åkesson et de ses chocolats

Bertil Åkesson est un des piliers du mouvement bean-to-bar actuel. Jouant sur deux tableaux, il fourni plusieurs producteurs en fèves de ses plantations et produit également ses propres tablettes de chocolat. Un délice pour qui souhaite comprendre l’impact du travail du torréfacteur sur le résultat final. Outre ses tablettes carrées frappées d’un Å reconnaissables entre toutes, il prend aussi le parti de créer des chocolats typés qui mettent le cacao au cœur de l’expérience. Difficile de ne pas s’étonner devant la gourmandise de ses éclats de cacao (habituellement si fades chez les chocolatiers-confiseurs) et de ne pas penser au cacao épicé des Mayas avec le poivre. Des interprétations résolument modernes et traditionnelles à la fois qui ne laissent pas indifférent.

Merci à Chocolats du Monde pour ces tablettes.

Flat White Coffee Chocolate par Naive de Vilnius en Lituanie

Flat White Coffee Chocolate Naive
  • Fèves : blend (tenu secret !)
  • Producteur de cacao : secret
  • Origine : Équateur
  • Pourcentage : 61%
  • Inclusions : chocolat au lait et café du Salvador torréfié en Lituanie

Notes de dégustation

La robe brun chocolat donne le ton, c’est un dark milk. Et ce quoi qu’en dise le nom de Flat White donné par Naive. Le nez trahit la présence de café, sans pour autant sacrifier l’impression de cacao. La casse plus molle ne laisse pas de doute : il y a aussi du lait ! En bouche, le café donne ouvre le bal, mais le chocolat n’est pas en reste. Commence alors un tango langoureux. Le chocolat distille des notes fruitées exotiques, qui viennent caresser celles du café torréfié. Le tout sans qu’aucune des deux sensations ne prenne le dessus. La trame est assurée par le fondant lacté qui sert de liant et équilibre la relation en révélant des notes de noix. Le lait ajoute également de la douceur, pour ne pas dire la tendresse. La longueur en bouche est belle, mais difficile à évaluer tant l’envie de se laisser emporter à nouveau est pressante.

Le petit plus : Des dires mêmes du maître chocolatier qui a conçu la tablette, goûtez-la avec un de ces fruit : pêches, pruneaux et abricots. Pour ma part, ce sera la pêche de vigne.

Flat White Coffee Chocolate Naive
J’étais naïf en pensant que je pourrais faire une photo de la tablette avant d’y goûter… L’effet de la Flat White Coffee Chocolate de Naive est terrible…

Mais encore… à propos de Naive et de ses chocolats

Vilnius, la capitale de la Lituanie, n’est pas la ville la plus réputée pour le chocolat… Pourtant, Naive illustre avec brio ce qu’une approche décomplexée du chocolat permet d’achever en terme d’excellence.

Le graphisme de l’emballage attire l’œil et annonce la suite du spectacle. L’intérieur offre une pléthore d’informations intéressantes, sans en faire trop. Puis, une fois révélée, la forme du chocolat interpelle et donne le temps de le regarder. Bien joué ! Finalement, le goût arrive en apothéose. L’expérience de cet ensemble est d’autant plus forte grâce à ce voyage bien pensé.

Gustativement, le mariage — le terme n’a jamais été aussi juste — du chocolat et du café est un exercice de style maîtrisé ici de façon impressionnante. Trop souvent les inclusions ne font que cohabiter avec le chocolat, sans le mettre en valeur. Ici, la gourmandise chocolatée s’associe à merveille au caractère du café pour le plus grand plaisir des papilles. S’amuser à identifier les notes lors de la dégustation est un vrai plaisir.

Cerise sur le gâteau, Naive produit ses chocolats grâce au commerce direct de cacao et réalise ses emballages à partir de matériaux recyclés. Mais mon point préféré reste le fait que le travail et la démarche du chocolatier soit expliqués et mis en avant. J’en oublierais presque ma frustration de ne pas en savoir plus sur l’origine du cacao et sa transformation…

Flat White Coffee Chocolate par Naive
Flat White Coffee Chocolate par Naive vue en entier grâce à DomCzekolady.

Pucallpa par la Chocolaterie de Gruyères en Suisse

Pucallpa de Chocolaterie de Gruyeres
  • Fèves : Non mentionné (probablement Trinitario local)
  • Producteur de cacao : Inconnu
  • Origine : région de Pucallpa, dans l’Amazonie préuvienne
  • Pourcentage : 75%

Notes de dégustation

La robe marron cacao profonde contraste avec le nez léger, plutôt fruité et acidulé. La casse est presque un peut trop effilochée, tant la tablette est fine. Attention, elle fond très facilement entre les doigts. En bouche, c’est heureusement plus lent. Vient d’abord une sensation de cacao, presque comme délayé dans de l’eau, qui domine avant que n’arrive une impression fruitée, mêlée de noix grillées (cacahuètes ?) et un je ne sais quoi de zeste de citron. La texture est très tannique, astringente et empli la bouche. La longueur n’a rien à envier en termes d’intensité et de caractère. Le terme de torréfaction douce semble presque incongru pour décrire cette tablette. Une création qui sort des sentiers battus en terme de goût et mériterait une torréfaction encore plus travaillée.

Le petit plus : Réservez ce Pucallpa de la Chocolaterie de Gruyère pour une dégustation en apéro avec un morceau d’Époisses pas trop affiné ou après le repas avec un verre de cognac.

Un format généreux pour la tablette Pucallpa de la Chocolaterie de Gruyère, mai très (trop ?) fin.

Mais encore… à propos de la Chocolaterie de Gruyères en Suisse

Haut lieu du tourisme helvétique, le village de Gruyères a trop longtemps été associé à la visite de la fabrique Cailler, non loin de là. Malgré tout le marketing déployé par la maison mère Nestlé, il s’agît bien de visiter une usine de production de chocolat industriel. Le fait qu’une chocolaterie à Gruyères même, qui plus est bean-to-bar, soit accessible aux hordes de touristes est donc une excellente nouvelle ! Mon regret principal est que l’artisan ne mette pas mieux en valeur son travail. Il ne fait nulle mention de la variété de cacao sélectionnée, de son origine et des détails de torréfaction et de conchage. C’est d’autant plus regrettable que dans l’usine industrielle voisine l’illusion de savoir d’où vient le cacao et comment il est transformé méprend à merveille les visiteurs. La Chocolaterie de Gruyères a pourtant tout pour faire mieux. Le chocolat suisse artisanal semble toujours être timide lorsqu’il s’agît de se démarquer.

La formule fonctionne malgré tout et la chocolaterie ne désemplit pas, proposant même des glaces en été. Attention toutefois aux étiquettes : plusieurs chocolats sont faits à base de couverture Felchlin,. Ils ne portent pas la mention bean-to-bar.

Création pour le Rallye du chocolat de Zurich par Kürzi

Création de Kuerzi au Rallye du chocolat de Zurich
  • Fèves : Trinitario tanzaniennes
  • Producteur de cacao : Kokoa Kamili cooperative
  • Origine : vallée du Kilombero au centre de la Tanzanie
  • Pourcentage : 72%
  • Inclusions : orange sanguine, caramel et éclats de fèves de cacao

Notes de dégustation

La robe sombre est typique de ces fèves tanzaniennes qui sont très riches en notes délicates. Au nez, la sensation de chocolat se mêle à une impression gourmande. La casse est franche. En bouche, c’est d’abord la texture qui frappe avec ce fort contraste entre le chocolat d’un côté très lisse et de l’autre très structuré avec le saupoudrage des inclusions en surface. Cette sensation donne confère un côté biscuit à la tablette. Les papilles sont également mises à contribution : l’orange sanguine donne le ton, alors que le caramel adoucit les éclats de fève de cacao pour équilibrer le tout. Le chocolat reste presque un peu trop en retrait dans cette symphonie de saveurs. Il revient toutefois en fin de bouche pour donner de la longueur et donner envie d’en reprendre juste un morceau pour goûter. Très sucrée cette création de Kürzi pour le Rallye du chocolat de Zurich s’adressait manifestement à un grand public en besoin de douceur. Mission accomplie.

Création de Kuerzi au Rallye du chocolat de Zurich
Création de Kuerzi pour le Rallye du chocolat de Zurich 2022

Mais encore… à propos du Rallye du chocolat de Zurich

Le Rallye du chocolat de Zurich du printemps 2022 était non seulement une première dans cette ville, mais aussi une première parce qu’il proposait une catégorie dédiée spécialement au bean-to-bar. La plupart des participants de cette catégorie ont joué la sécurité en proposant une création déjà rodée. Britta Kürzi de la maison éponyme a relevé le défi avec plus d’audace. Le thème était agrumes et éclats de fèves de cacao. Partant de sa tablette noire avec du cacao tanzanien, elle a décidé de réaliser une création pour l’occasion. En tant que membre du jury et connaissant les contraintes d’autant plus fortes des petits producteurs bean-to-bar, je suis d’autant plus sensible à l’effort particulier de Britta. A mon avis, elle est restée un peu trop proche d’une clientèle sensible à la douceur. Elle a ainsi sacrifié un peu trop de l’équilibre entre l’inclusion et le chocolat. Toutefois, j’espère qu’elle inspirera d’autres producteurs à sortir de leur zone de confort et d’oser ce genre de mariage. Son travail reste malgré tout bien plus intéressant que ce que réalisent les chocolatiers travaillant uniquement de la couverture.

Mexico Almendra Blanca par Goodnow Farms de Sudburry, USA

Mexico Almendra Blanca Goodnow Farms
  • Fèves : Porcelana (ou Almendra Blanca)
  • Producteur de cacao : Hacienda Jesus Maria de Vincente Cacep
  • Origine : Villahermosa, Tabasco, Mexique
  • Pourcentage : 77%

Notes de dégustation

La robe chocolat au lait saute aux yeux ! Pour un chocolat noir qui flirte avec les 80%, c’est particulièrement marquant. Au nez des notes de raisins sec et de figues séchées donne une impression très gourmande. La casse est très nette pour une tablette aussi fine et aussi… lactée en apparence. Sur la langue la texture soyeuse contraste avec les notes épicées qui distillent une impression pimentée et poivrée. Au fur et à mesure que le chocolat fond, les sensations fruitées ressenties au nez viennent compléter le tableau. Équilibré, l’ensemble garde pourtant quelque chose d’agréablement insaisissable qui donne envie d’y goûter encore. D’ailleurs, au deuxième round, les touches fruitées gagnent en clarté, faisant ressortir une saveur de framboise. Discrète, la longueur en bouche n’en reste pas mois belle et fraîche. Ce caractère insaisissable constitue la signature de ce chocolat unique.

Le petit plus : Laissez fondre en bouche un morceau jusqu’à ce que les arômes se déploient pleinement, puis, ajoutez y une pointe de lait condensé. Moment régressif garanti ! Attention à doser de façon homéopathique le lait condensé dont la sucrosité ne doit pas prendre le dessus.

Mexico Almendra Blanca Goodnow Farms
Un chocolat noir intense qui se cache sous la robe d’un chocolat au lait

Mais encore… à propos de Goodnow Farms et des cabosses blanches d’Almendra Blanca

Cette tablette a tout de suite attiré mon attention, car les chocolats produit à partir de fèves Porcelana ou blanches de la région de Tabasco m’ont toujours beaucoup plu et sortent de l’ordinaire. Goodnow Farms au Massachusetts, non loin de Boston, a su tirer tout le potentiel de ce cacao d’exception et leurs nombreuses récompenses témoignent de leur talent. Si les fruits du cacao peuvent présenter des couleurs allant du jaune canari au violet intense, ces cabosses blanches détonnent, même dans le bestiaire du cacao. Cette particularité est due à une mutation génétique naturelle qui modifie leur pigmentation, de façon similaire aux animaux albinos.

Cette différence s’exprime aussi au niveau gustatif avec des fèves moins astringentes et souvent au goût très fruité. Il n’est pas rare que les tablettes qui en sont constituées soient également plus claires, car contenant probablement moins de tannins. Les fèves de ce type sont en quelque sorte l’équivalent des variétés de raisin donnant du vin blanc sous nos latitudes. Connaissant la variété des cépages et les variations des millésimes, je vous laisse imaginer ce qu’il en est avec le cacao qui s’hybride très facilement et se récolte plusieurs fois par an…

Cabosse d’Almendra Blanca au Mexique, crédit Goodnow Farms