Terrua Tuerê par Casa Lasevicius à Sao Paulo au Brésil

Chocolat Terrua Tuerê par Casa Lasevicius
  • Fèves : mélange d’hybrides de trinitario
  • Producteurs de cacao : Waldomiro Broechl de Sitio Bom Jesus
  • Origine : Région du Para au Brésil
  • Récolte : 2021
  • Pourcentage : 70%

Notes de dégustation du chocolat Terrua Tuerê par Casa Lasevicius

La robe brune se pare de jolis accents acajou et joue particulièrement avec la lumière. Le nez oscille entre cacao et chocolat avec des notes de fruits secs. La casse est franche et légèrement sourde. Quant au croquant, il est sonore. Ensuite, en bouche, les notes chocolatées soulignées de fruits donnent le ton. La texture fondante et particulièrement recouvrante confère au tout un délicieux sentiment de gourmandise. Très linéaire, le goût se laisse découvrir pour que les notes deviennent clairement celles de fruits rouges. Finalement, la longueur apporte une pointe d’astringence qui ajoute de l’élégance, tout en maintenant une tenue impressionnante dans le temps. Une tablette qui représente la quintessence d’un chocolat noir classique de par son côté épuré. On en redemande.

Le petit plus : Dégustez ce chocolat avec une gorgée de kompot de cerises et de framboises. Aussi simple que bon.

Chocolat Terrua Tuerê par Casa Lasevicius
Chocolat Terrua Tuerê par Casa Lasevicius, une petite tablette dont l’apparence minimaliste cache un trésor gustatif.

Les trésors du Brésil

Terrua Tuerê Casa Lasevicius, un chocolat qui ne paye pas de mine. Même la mention de la distinction obtenue ne saute pas au yeux et paraît presque anecdotique, s’agissant d’un prix d’un festival amazonien… Pourtant, à qui s’intéresse un peu aux tendances actuelles, cette tablette titille la curiosité. En effet, le Brésil s’impose de plus en plus comme un acteur incontournable du cacao fin. En outre, la présence bien en vue du producteur de cacao est un autre indice de bon augure.

Finalement, le nom de la marque, Casa Lasevicius, attise également la curiosité. Les observateurs les plus aguerris lui trouveront à juste titre quelque chose de balte. Effectivement, la famille à l’origine de cette production bean-to-bar est installée au Brésil depuis un peu moins de 100 ans, après avoir émigré de Lituanie. Un autre pays dont les chocolats se distinguent ! Autant de raisons pour avoir envie d’explorer l’histoire et les trésors insoupçonnés du Brésil.

La note du sommelier
Il est des surprises qui fonctionnent en cascade. Tout d'abord la découverte d'une excellent chocolat, puis d'une marque peu connue et intéressante pour finalement aboutir sur une histoire familiale qui mêle les destins de populations dispersées par les aléas de la grande Histoire, qui écrit le récit de la mondialisation depuis plus longtemps que nous en avons conscience au quotidien. De quoi nous rappeler les enjeux planétaires depuis une autre perspective. Quand je vous dis que manger du chocolat apporte plus qu'il n'y paraît...

Procope : Desplanches fait du bean-to-bar à Genève

Procope Desplanches, les chocolats noir et au lait avec du cacao Del Lago.

L’entreprise Desplanches est un acteur bien implanté de la place genevoise. Des créations chocolatées à la boulangerie, ils proposent un large assortiment. Désormais, c’est sous la marque Procope que Desplanches produit son propre chocolat, rejoignant la tendance bean-to-bar. En visite, j’en ai profité pour acheter six tablettes différentes au sein d’un assortiment très fourni tant en termes d’origines, de déclinaisons lactées ou de différents pourcentages de cacao. La vendeuse s’est montrée particulièrement sympathique. Je me réjouissais donc de goûter ces créations.

Del Lago par Procope de Desplanches à Genève

Sur l’ensemble choisi, mon attention s’est portée sur deux tablettes déclinant du cacao vénézuélien en chocolat noir et au lait. Pourquoi ? Parce que leurs fèves sortent des « classiques » du bean-to-bar, tout en étant proches de ce qui se trouve en Suisse en matière de couverture. De quoi pouvoir identifier le type d’approche gustative choisie par Procope pour créer sa signature bean-to-bar. Dans la pratique, pour ces deux chocolats :

  • Fèves : hybrides Trinitario et Criollo
  • Producteurs de cacao : non-spécifié, sourcé par Fanzuela
  • Origine : Sud-ouest du lac Maracaïbo au Venezuela
  • Récolte : inconnue
  • Pourcentage : 70% (noir) et 50% (lait)
  • Inclusions : lait en poudre (pour la tablette au lait uniquement) et lécithine de tournesol

Notes de dégustation du chocolat noir

La robe marron est belle et relativement claire pour un chocolat noir. Le nez très chocolat est plat, laissant à peine filtrer quelques notes épicées. La casse est cristalline et le croquant net. En bouche, les notes semblent sourdes. En insistant, le cacao dévoile des touches (très) torréfiées, de noisette et une pointe discrète de poivre de Jamaïque. La texture est étonnement peu fondante. Enfin, la longueur est en retrait et distille les mêmes notes.

Procope Desplanches, les chocolats noir et au lait avec du cacao Del Lago.
Procope Desplanches, les chocolats noir et au lait réalisés avec du cacao du Venezuela.

Notes de dégustation de la tablette au lait

La livrée brun caramel différencie clairement la variante lactée. Le nez est sans reliefs, à peine chocolaté. La casse est étonnement sonore, tout comme le croquant. En bouche, la texture sèche et friable donne le ton avant de laisser place aux notes de biscuits secs et de noisette. De même, la longueur reprend ce motif avant de se dissiper rapidement. Heureusement serait-on tenté de dire.

Procope de Desplanches, un bean-to-bar comme un autre ?

Les conditions de stockage à l’intérieur de la boutique ont clairement eu une influence sur les tablettes. En effet, trois sur six présentaient des signes de blanchiment une fois déballées. Un constat d’autant plus inquiétant que j’ai acheté ces chocolats hors période estivale. Si l’impact gustatif de ce blanchiment n’est pas nul, la qualité du travail de fond laisse malgré tout à désirer. En effet, je goûte des chocolats ayant soufferts de mauvaises conditions de transport, mais la qualité du travail reste parfaitement identifiable.

Dans le cas présent, la torréfaction du cacao est approximative. Un constat d’autant plus décevant que Procope est l’enfant de Desplanches, un chocolatier établi. De plus, de nombreux entrepreneurs chocolatiers sans bagage se montrent plus assidus dès leurs débuts. De même, la démarche souffre d’un autre travers : vouloir recréer les standards du chocolat de couverture. C’est pourquoi, le caractère des petits lots de cacao ne se retrouve pas dans cette approche.

Finalement, l’écueil gustatif sur lequel Procope bute est particulièrement frustrant en raison de la démarche initiale. En effet, la boutique dispose d’un bon service et met en avant le travail avec un laboratoire visible. Mieux, un système de QR-code sur les tablettes permet de retracer l’origine des ingrédients. Même si la plateforme est peu intuitive, l’approche d’ouvrir la traçabilité des ingrédients est à saluer.

La note du sommelier
Faut-il partager un avis négatif ? C'est la question que je me suis longuement posée face à ces chocolats. Si j'ai décidé de passer outre mes réticences, c'est pour plusieurs raisons. Malgré un message à l'entreprise pour leur signaler le problème, je n'ai reçu aucun réponse. Procope existe maintenant depuis quelques temps, les erreurs de jeunesse auraient pu, dû être corrigées dans l'intervalle. Finalement, ce beanto-bar venant d'un chocolatier établi, ces faux pas cumulés sont vraiment décevants et ternissent l'image des autres artisans s'engageant dans cette démarche. C'est pourquoi je préfère avertir les clients et espère surtout pouvoir changer d'avis sur Procope dans le futur !

Chocolat au lait au cannelé par La Fèverie à Bordeaux en France

Chocolat au cannelé de La Fèverie
  • Fèves : hybride de trinitario
  • Producteurs de cacao : Fazenda Camboa
  • Origine : région de Bahia au Brésil
  • Récolte : inconnue
  • Pourcentage : 55%
  • Inclusions : lait demi-écrémé en poudre, cannelé et lécithine de tournesol

Notes de dégustation du chocolat au lait au cannelé par La Fèverie

Entre le caramel et le mordoré, la robe annonce déjà le caractère gourmand. Le nez y ajoute une impression lactée et de gâteau fraîchement sorti du four. La casse est friable et le croquant agréable. En bouche, c’est la texture granuleuse qui indique le caractère atypique de cette tablette. Des notes cacaotées et de caramel très gourmandes se déploient alors que le chocolat fond vite, très vite. Si le cannelé semble poindre au milieu de ces saveurs, c’est en finale qu’il se révèle de façon cristalline, tout en jouant sur la vanille. Finalement, la longueur glisse lentement du cannelé pour revenir vers le cacao de caractère, tout en gardant la trame gourmande de l’ensemble. L’équilibre dynamique de la composition est particulièrement intéressant.

Le petit plus : Restez dans le Bordelais et le gourmand, accordez ce chocolat avec un Sauternes encore jeune.

Chocolat au cannelé de La Fèverie
Le chocolat au lait et au cannelé de La Fèverie. Avouez que ça en jette.

Le cannelé et le lait (rime avec le bon accent)

L’icône sucrée qu’est le cannelé et le chocolat de La Fèverie, une rencontre orchestrée par la chocolatière en cheffe Hasnaâ. Une création qui résume bien les 10 ans de cette adresse parmi les pionniers du bean-to-bar en France. Des premiers chocolats grands crus aux tablettes et ganaches plus gourmandes, la marque reste ancrée dans le terroir.

Ainsi, la chocolaterie se démarque également par des ganaches aux vins de la région. Un exercice créatif difficile, tant les caractères du chocolat et du vin peuvent s’avérer trop fougueux pour maintenir l’équilibre du mariage. Mais maîtrisée, cette approche au plus près des produits permet de se démarquer. Et tant mieux. Dans le cas du cannelé, le chocolat garde son identité en y liant la gourmandise du gâteau bordelais.

Si le choix d’un chocolat au lait apporte le bon équilibre, il est intéressant de noter que la Brigaderie de Paris transforme les mêmes fèves de cacao pour réinterpréter un plat brésilien, mais en les déclinant en chocolat noir.

La note du sommelier
Incorporer une "recette" complète dans un chocolat est toujours un défi. Car si les goûts peuvent à priori se marier, le fait de déconstruire la pâtisserie ou le plat revient à transporter le goûteur dans un autre univers, sans repères. Si l'exercice est généralement synonyme de succès commercial, ce n'est pas toujours le cas en termes gustatif. Pourtant, dans ce cas, je n'ai pas boudé mon plaisir. La gourmandise du cannelé est bien présente, avec ses accents caramélisés, tout en étant renforcée par celle du chocolat. Joli.

Feijoada par La Brigaderie de Paris en France

Chocolat Feijoada par la Brigaderie de Paris
  • Fèves : hybrides de Trinitario
  • Producteurs de cacao : Fazenda Camboa
  • Origine : Etat de Bahia au Brésil
  • Récolte : 2020
  • Pourcentage : 70%
  • Torréfaction : courte
  • Inclusions : haricots noirs, riz soufflé, noix de coco fumée, oranges confites

Notes de dégustation du chocolat Feijoada de la Brigaderie de Paris

La robe brune présente des accents acajou. Le nez est désorienté par la richesse des sensations des inclusions serties dans cette tablette. La casse est sonore, le croquant incertain avec la présence des inclusions. En bouche, l’explosion de saveurs ne se fait pas attendre et les multiples textures ajoutent à la découverte. A la richesse gustative des ingrédients, le cacao du chocolat apporte une trame faite de notes de réglisse et d’épices. Un délice qui faute de repères évoque un sentiment de biscuits de Noël. Finalement, la longueur laisse une impression égale à celle de la dégustation, d’une grande richesse.

Le petit plus : Mâchonnez ce chocolat, jouez avec en bouche et oubliez qu’il s’agît de chocolat. Si vraiment, accompagnez le d’un verre de rouge, de ceux qu’on ouvre pour les fêtes.

Chocolat Feijoada par la Brigaderie de Paris
Chocolat Feijoada par la Brigaderie de Paris, des ingrédients symboles de la gastronomie brésilienne sertis dans une tablette.

Le chocolat, ce représentant de la tradition gastronomique

Les créations de La Brigaderie de Paris vont des chocolats noirs aux notes ciselées aux créations originales comme le chocolat blond aux épices d’Amazonie. Le point commun de ces explorations gustatives est sans l’ombre d’un doute le terroir brésilien. Que ce soit pour exprimer les arômes des fèves de chaque région ou pour incorporer la tradition gastronomique du pays. Ce Feijoada de la Brigaderie de Paris ne fait pas exception.

Mais au fait, qu’est-ce que la feijoada ? C’est un repas populaire à base de… haricots ! Certes, sa variante brésilienne est souvent aigre-douce, car accompagnée d’oranges, mais le fait de décliner ce plat en chocolat peut surprendre. D’autant que tout y est ou presque : haricots, riz – soufflé pour l’occasion –, oranges confites, noix de coco fumée. Ne manque que la viande. Le tour de force est d’utiliser cette base pour la sublimer en une création nouvelle, inattendue.

L’audace paie, car cette tablette a reçu une médaille d’argent européenne lors des International Chocolate Awards de 2021. Une belle performance pour un chocolat inspiré d’un plat carné !

La note du sommelier
Ayant déjà goûté du chocolat à la viande, je m'attendais à tout. Pourtant, cette interprétation m'a surpris. L'idée de "remplacer" la viande et son côté umami par la coco fumée et le chocolat, qui apportent leur propre caractère et substance, tout en jouant sur la dimension sucrée-salée, est aussi audacieux que réussi. Cet exercice illustre, une fois encore, à quel point le fait de puiser dans ses racines, quitte à s'éloigner des tendances, permet de réaliser des accords aussi innovants que réussis.

El Limón par Solstice à Salt Lake City aux USA

El Limón Solstice chocolat
  • Fèves : nacional arriba
  • Producteurs de cacao : Hacienda Limon
  • Origine : province de Cotopaxi en Equateur
  • Récolte : inconnue
  • Pourcentage : 70%

Notes de dégustation du chocolat El Limón par Solstice

Profonde, la robe brune tire vers le bistre. Le nez est fin, distillant des notes chocolatées et d’épices. La casse est puissante et le croquant net. En bouche, les notes chocolatées donnent le ton. Le côté gâteau procure une grande gourmandise, qui est soulignée par quelques notes de cédrat confit et de cerise. Le tout sans aucune amertume ou astringence, dans un bel équilibre. Finalement, la belle longueur dévoile des notes de miel et de fleurs sucrées. Une édition limitée que l’on regrette de voir disparaître avant même d’avoir terminé la tablette.

Le petit plus : Faites une autre folie, associez ce chocolat un verre de Point final I, un vin rouge tout en finesse créé par Novel à Genève.

Chocolat El Limón Solstice
La robe très sobre du chocolat El Limón de Solstice cache bien son caractère particulièrement gourmand.

Un Solstice au goût de crépuscule

Les créations de Solstice m’ont toujours intéressé. Malheureusement, ce producteur américain de Salt Lake City dans l’Utah ferme ses portes après de belles années. Est-ce la conjoncture économique ou la difficulté de dégager des marges suffisantes dans un domaine difficile ? Les facteurs et les périls sont nombreux. Reste qu’ils ne sont ni les premiers, ni les derniers. Une tendance qui, si elle est difficile à évaluer, interroge quant à la viabilité du mouvement bean-to-bar.

A noter que leur approche en termes de communication ne mettant pas l’accent sur l’origine des fèves et de leur torréfaction du cacao n’a probablement pas aidé les consommateur à percevoir la valeur ajoutée de leur travail. Ce qui est dommage, car ce El Limón de Solstice a du potentiel tant gustativement qu’en terme d’histoire. Par exemple, La Flor, qui travaille le même cacao, le met bien plus en avant.

La note du sommelier
Personnellement, la fermeture de Solstice m’attriste. D'autant que c'est avec un de leurs tablettes que je m'étais amusé à expérimenter l'influence de la musique sur la perception sensorielle du chocolat. Un excellent souvenir, qu'il me faudra désormais recréer avec un autre chocolat. Rien de rédhibitoire pour le gourmand, mais malgré tout une pointe de nostalgie.

Chocolat noir ou au lait ?

Chocolat noir ou au lait: exemple avec le Sierra Leone de Notes de fève

Lequel est meilleur ? Le chocolat noir ou au lait ? Outre le fait qu’il s’agisse surtout de préférences gustatives personnelles, la question est souvent un non-sens. En effet, les tablettes invoquées pour la comparaison sont souvent de producteurs différents, avec des cacaos différents, etc. Pas de quoi alimenter la réflexion de façon très productive. Pourtant, grâce aux producteurs bean-to-bar, il est possible de faire avancer le débat… tout en mangeant du bon chocolat. Alors sans plus attendre faisons avancer la science !

Sierre Leone Kailahun de Notes de fève à Matran en Suisse

La maison Notes de fève propose deux chocolats parfaits pour cet exercice. Les deux tablettes sont réalisées non seulement par le même chocolatier, mais en plus avec du cacao de la même origine et du même millésime. Cerise sur la gâteau, le chocolat au lait est un dark milk, aussi appelé ultra-cacaoté. De quoi s’assurer que le sucre ne prenne pas le dessus et que l’ajout de lait soit uniquement là pour transformer le profil gustatif du cacao. Des conditions idéales pour réaliser un comparatif.

  • Fèves : trinitario et forastero
  • Producteurs de cacao : Village Hope
  • Origine : région de Kailahun en Sierra Leone
  • Récolte : 2022
  • Pourcentage : 80% (noir) et 67% (lait)
  • Inclusion : lait en poudre (pour la tablette au lait uniquement)

Notes de dégustation du chocolat noir

La robe noir ébène joue avec la lumière pour le plus grand plaisir des yeux. Le nez est particulièrement chocolaté avec quelques traces de cacao. La casse est relativement discrète et le croquant plutôt friable. En bouche, le cacao ouvre le bal et déroule des notes automnales boisées, de noix ou encore d’écorce de pomme. La texture étonne, oscillant entre fondant et friable, ajoutant au caractère atypique du chocolat. Enfin, la longueur est belle et révèle des tannins souples et agréables, tout en rappelant les notes de noix. Un chocolat complexe qui redemande à être goûté plusieurs fois. Parfait pour le brunch d’un dimanche d’automne.

Le petit plus : Pour rester proche de l’esprit fribourgeois de la chocolaterie, associez un morceau à un peu de cuchaule.

Chocolat noir ou au lait: exemple avec le Sierra Leone de Notes de fève
Chocolat noir ou au lait, l’exemple avec le Sierra Leone de Notes de fève. Avouez que la nuance de couleur est subtile !

Notes de dégustation de la tablette au lait

D’un ton plus clair à peine décelable, la robe ébène ne laisse pas filtrer au premier abord la nature lactée du chocolat. Au nez, le goûteur distrait pourrait ne pas remarquer la pointe lactée qui souligne discrètement le côté très chocolaté. Un peu plus molle, la casse donne déjà plus d’indices, tout comme le croquant. En bouche, le doute est dissipé, c’est bien un chocolat différent du premier. La texture grasse et prenante rappelle celle d’un Bourgogne. Les notes cacaotées sont accompagnées de celles de noisettes grillées et toujours ce je ne sais quoi de lacté. Le tout laisse poindre quelques accents inattendus qui font penser à de la réglisse et peut-être à nouveau ce je ne sais quoi d’écorce de pomme. De même, la longueur fait ressortir les tannins et confère du racé au tout. A nouveau, il faut goûter encore et encore.

Le petit plus : Prenez un tout petit morceau de datte séchée et accompagnez-le d’un morceau de chocolat qui se transforme alors en pâte à tartiner régressive à souhait en faisant ressortir d’autant plus le côté noisette grillée, voire de massepain ! D’ailleurs, le même exercice avec le chocolat noir renforcera ce côté massepain.

Alors… chocolat noir ou au lait ???

Grâce à cette comparaison, il est intéressant de noter que le lait peut réellement devenir un révélateur du cacao. En faisant ressortir certains traits, il transforme l’expérience sans rien ôter à la richesse gustative du cacao. Au contraire, il peut même apporter de nouvelles notes. Est-ce que cela signifie que le chocolat au lait prévaut sur le chocolat noir ? Définitivement, non. Les deux se valent en terme de qualité sensorielle.

Ainsi, il ressort clairement de l’exercice que l’ajout ou non de lait dépend fortement du cacao utilisé, de la façon de le travailler et du résultat recherché. Si le but est simplement de travailler l’aspect gourmand, la comparaison n’a même pas lieu d’être. En revanche, si le lait est vu comme un ajout pouvant transformer le cacao, alors la question est parfaitement pertinente et avoir une préférence est tout à fait défendable par des arguments en lien avec la qualité du cacao et son potentiel gustatif.

La note du sommelier
Les producteurs qui fabriquent du chocolat au lait font souvent cet exercice de comparaison avec le pendant non-lacté de leur création. Ainsi, ils se retrouvent souvent face aux mêmes dilemmes. Ce qui est dommage, c'est que ce travail, en plus d'être invisible, n'est pas valorisé. Les deux tablettes présentées ici illustrent bien l'intérêt gustatif aussi pour les consommateurs. Une façon d'éduquer le client tout en s'amusant. Que demander de plus ?

Tesoro Escondido par LaFlor à Zurich en Suisse

Tesoro Escondido de LaFlor
  • Fèves : nacional, criollo et trinitario
  • Producteurs de cacao : coopérative ASOPROTESCO
  • Origine : province d’Esmeraldas en Equateur
  • Récolte : 2021
  • Pourcentage : 75%

Notes de dégustation du chocolat Tesoro Escondido par LaFlor

D’un beau brun profond, la robe tire légèrement vers l’acajou. Très cacaoté, le nez incarne l’archétype du chocolat noir : racé et gourmand. En raison de la finesse de la tablette, la casse est discrète. Malgré tout, le croquant est plus marqué. En bouche, le soyeux donne la première impression qui rapidement se mue en un mélange cacaoté dont les tanins tapissent la langue. Ensuite, des notes ciselées de fruits rouges, de poivre et de genièvre dessinent la trame gustative. Finalement, la longueur se caractérise par le côté très cacaoté, agréablement torréfié. Un chocolat noir dont le classicisme rivalise avec son caractère et son l’élégance. Un sentiment probablement souligné par le moule élancé de la tablette.

Le petit plus : Si vous aimez les gins, tentez de marier ce chocolat à un gin aux fruits rouges – il semblerait que ce soit à la mode actuellement.

Tesoro Escondido de LaFlor
Tesoro Escondido de LaFlor, une tablette de chocolat aussi classique qu’élégante.

Un succès qui se décline

Ces fèves plaisent et la marque a su se les approprier avec succès et panache. En effet, ce Tesoro Escondido de LaFlor se décline en noir classique à 75%, mais aussi en une tablette 100%. Sans compter qu’il est aussi disponible en chocolat de couverture, avis aux gourmands qui souhaiteraient l’utiliser en pâtisserie… De quoi sublimer vos gâteaux, mousses ou encore glaces et sorbet au chocolat !

Ce chocolatier fait partie des pionniers du bean-to-bar zurichois. Le chocolat noir est un pari audacieux dans une région où la culture du chocolat au lait prédomine. Pourtant, le succès de ce noir très classique illustre bien la place à prendre. Aujourd’hui, la marque reste fidèle à ses engagements et ses valeurs, tout en ayant gagné en savoir-faire en termes de travail des fèves. Une belle histoire à laquelle on ne peut que souhaiter de perdurer encore longtemps !

La note du sommelier
En plus de voir la progression de LaFlor, je suis surtout ravi de constater qu'ils jouent la carte de la transparence et de l'information au consommateur. En effet, chaque origine de cacao est présentée en détails : nom des producteurs ou de leur coopérative, type de fève, type de commerce – par exemple, achat direct – ou encore moyen d'importation – par exemple, acheminement par bateau. Ne manque que le prix payé au producteur pour un sans faute.

PS: Le nom de cette tablette, qui signifie Trésor caché, rappelle une autre création portant le même nom, mais réalisée avec d'autres fèves par Qantu.

Chocolat aux fruits exotiques : bonne ou mauvaise idée ?

Chocolat aux fruits exotiques: physalis et banane, ainsi que corossol, deux tablettes créées par Naive.

Le chocolat aux fruits exotiques est… exotique ! Dans tous les sens du terme. Au-delà des inclusions classiques en Europe, il apporte une touche d’originalité et de destinations lointaines. Mais c’est aussi et surtout l’occasion de faire résonner la cacao avec les autres fruits des écosystèmes où il se trouve. Toutefois, il est intéressant de voir si le mariage fonctionne réellement. Pour répondre en partie à la question, deux chocolats de chez Naive en Lituanie peuvent servir d’exemple.

Chocolat exotique : Soursop par Naive en Lituanie

  • Fèves : inconnues
  • Producteurs de cacao : inconnus
  • Origine : inconnue
  • Récolte : inconnue
  • Inclusion : corossol
  • Pourcentage : 67%

La robe brou de noix joue avec la lumière de par la forme de la tablette tout en courbes. Le nez très cacaoté révèle aussi quelques notes inattendues tendant vers la confiture de cerise et le pain d’épices. La casse est molle. Le croquant net. En bouche, les notes fruitées se confirment. Cerises bien mûres, épices de Noël et une pointe d’acidité rappelant les fruits rouges. Le tout sur un lit chocolaté et porté par une texture particulièrement fondante sans être soyeuse, donnant ainsi de la consistance au chocolat. La longueur met d’abord en avant le cacao avant de bisser la pointe acidulée qui, alors, donne à entrevoir quelque chose d’exotiquement insaisissable. Finalement, peut-être faute de repères, on reste ancré dans des saveurs très classiques.

Le petit plus : Découvrez cette tablette avec une lampée de clairette de Die brute. Les bulles te le fruité du chocolat transfigurent les deux produits.

Chocolat aux fruits exotiques: physalis et banane, ainsi que corossol, deux tablettes créées par Naive.
Chocolat aux fruits exotiques : physalis et banane, ainsi que corossol, deux tablettes créées par Naive.

Chocolat aux fruits : Golden Berry & Banana par Naive en Lituanie

  • Fèves : inconnues
  • Producteurs de cacao : inconnus
  • Origine : inconnue
  • Récolte : inconnue
  • Inclusions : lait, physalis et banane
  • Pourcentage : 61%

Aux tons un peu plus chatoyants, la robe ne présage pas d’un chocolat au lait du fait de son pourcentage de cacao relativement élevé. Le nez est surprenant. Il mêle des touches chocolatées au notes typiquement umami de la banane séchée. La casse est inaudible et le croquant net. En bouche, le fondant prime. Puis, le chocolat distille des notes de bananes soulignées d’une pointe acidulée, certainement le physalis révélé par le lait. Le tout sur une trame très chocolatée dont, étonnement, on devine à peine le caractère lacté. La finale apporte des saveurs de noisettes grillées, soulignant la dimension gourmande de la création. Grasse et enrobante, la texture confère du corps, rendant le chocolat plus « nourrissant ». La longueur maintient de longues minutes une impression de pâte chocolatée très régressive.

Le petit plus : Complètement décadent de gourmandise, ce chocolat se prête à être transformé en crème glacée. Oserez-vous ?

Chocolat aux fruits exotiques : verdict

Si ces mariages apportent beaucoup de gourmandise à ces créations, il surtout intéressant d’observer que le cacao se marie très naturellement à ces fruits. Finalement, l’exotisme de ces chocolats n’en est pas un. En effet, le cacao et les fruits tropicaux poussent dans des climats souvent similaires. Dès lors, ne faudrait-il pas considérer une tablette aux noisettes comme étant le véritable mariage exotique ?

Malgré leur caractère gourmand réussi, ces chocolats illustrent aussi la difficulté de l’exercice. Ainsi, avec leur blend, les chocolatiers de Naive disposent de moins de marge de manœuvre pour ciseler leurs accords. C’est pourquoi un chocolat single origine aurait probablement été plus facile à travailler pour ce genre de création. Toutefois, la démarche est intéressante et mérite largement l’effort déployé par les créateurs lituaniens, dont de nombreux producteurs gagneraient à s’inspirer.

La note du sommelier
Sans bouder mon plaisir, à titre personnel, j'observe que j'ai souvent été plus convaincu par les mariages réalisés par des producteurs connaissant bien ces fruits, à l'instar de Mashpi ou de la Brigaderie de Paris. Reste qu'au-delà de l'harmonie, peu de ces accords font résonner des notes nouvelles qui ne sont présentes ni dans le cacao, ni dans le fruit exotique. Une rencontre aussi rare que précieuse.

Ambrosia par Naive à Vilnius en Lituanie

Ambrosia Naive chocolat
  • Fèves : mélange inconnu
  • Producteurs de cacao : inconnus
  • Origine : inconnue
  • Récolte : inconnue
  • Inclusions : pollen, miel sauvage de forêt et lécithine de tournesol
  • Pourcentage : 67%

Notes de dégustation de l’Ambrosia de Naive

La robe d’un chocolat profond joue avec la lumière de par la texture du moule et ses formes courbes. Le nez est aussi profond et dévoile déjà des notes de miel de forêt. La casse est précise et le croquant sonore. En bouche, les notes de miel de forêt sont cristallines. Au fur et à mesure qu’il fond, le morceau distille des touches de cacao et de brownie. Parfaitement uniforme, la texture rappelle celle d’un miel cristallisé et compact. Belle, la longueur redonne sa place au chocolat avec des notes cacaotées et de gâteau qui prenne le dessus, tout en gardant la touche sauvage du miel en filigrane. Un chocolat très gourmand, qui ferait presque penser à une pâte à tartiner… mais en tablette !

Le petit plus : Jouez la carte de la gourmandise en faisant toaster une tranche de tresse, puis déposez y un morceau de chocolat avant de croquer dedans. Régressif à souhait.

Ambrosia Naive chocolat
Ambrosia Naive, un chocolat sans carrés, tout en rondeur que ce soit visuellement ou gustativement.

L’art de vivre balte marié au chocolat

Naive n’en est pas à son coup d’essai en termes de mariage entre les produits du terroir baltes et le chocolat. D’ailleurs, cette tablette fait partie de leur collection des « chasseurs-cueilleurs » qui comprend notamment une déclinaison aux cèpes et au kéfir fort réussie. De plus, dans la mythologie grecque l’ambroisie est la nourriture des dieux. Ainsi, le parallèle avec le caractère divinement gourmand de l’Ambrosia de Naive est encore plus indiscutable.

Il est intéressant de comparer cette tablette sur le thème de l’apiculture est à une autre création lituanienne. En effet, le chocolat au cacao affiné en ruche de Beaningful présente le même pourcentage de cacao, mais une approche différente pour traiter de la même thématique. Le chocolat de Naive joue plus sur la gourmandise et le caractère sylvestre du miel. En revanche, ce choix met moins en avant les notes du cacao en tant quel tel.

La note du sommelier
Comparer deux chocolatiers lituaniens de talent travailler un chocolat sur le même thème est un véritable bonheur. De ces surprises qu'on ne rencontre dans aucun concours et illustrent la créativité des artisans. S'il fallait trancher, sur un critère purement technique, Beaningful maîtrise mieux le mariage avec le cacao pour révéler les notes de ce dernier. L'utilisation d'un blend auréolé du sceau du secret, ce qui est dommage à l'heure de la transparence, dessert la finesse des saveurs du cacao dans le cas de Naive. Reste que l'exercice est passé haut la main par les deux tablettes et à titre personnel, c'est des deux dont je me régale volontiers !

Crazy 88 par Soma à Toronto au Canada

Crazy 88 Soma chocolat
  • Fèves : trinitario local, Nacional Arriba, Nacional-Venezolano Amarillo
  • Producteurs de cacao : Ucayali River Cacao , Hacienda Victoria, Costa Esmeraldas (dans l’ordre des fèves ci-dessus)
  • Origine : Région d’Ucayali au Pérou, Province de Guayas en Equateur, Province d’Esmerladas en Equateur (dans l’ordre des fèves ci-dessus)
  • Récolte : inconnue
  • Pourcentage : 88%

Notes de dégustation du Crazy 88 de Soma

La robe uniforme tire au brun chocolat profond, quintessence du genre. Le nez est riche et sur le même thème du chocolat distille aussi des notes boisées et épicées. La casse est claquante et le croquant incisif. En bouche, la finesse des notes transporte les sens. darjeeling, touche de balsamique, pêche plate et un je ne sais quoi de floral. La texture grasse et enveloppante participe à ce sentiment de jardin secret qui se dévoile. Accueillant. Le tout dans un équilibre qui tient du miracle ; la tension entre douceur et caractère parfaitement maîtrisée. Si la longueur commence par une frustration avec la disparition du morceau de chocolat, la constance et la richesse des arômes subjugue. Ainsi, le plaisir dure et dure encore.

Le petit plus : Mariez ce chocolat à un thé blanc aiguille d’argent (duveteux) infusé à froid, p.ex. de chez Barton. Du grand art où le dosage en bouche fait tout.

Crazy Soma 88 chocolat
Crazy 88 Soma, un blend, c’est-à-dire chocolat réalisé à partir de fèves de cacao d’origines différentes.

Le blend, un art réservé aux meilleurs

Marier plusieurs variétés, origines et récoltes de cacao est une astuce utilisée par de nombreux industriels pour produire un chocolat toujours similaire à lui-même, souvent fade. Toutefois, effectuer ce même travail pour marier les forces de chaque cacao et révéler de nouvelles notes est en revanche beaucoup plus difficile.

Soma fait partie de ces rares maîtres chocolatiers qui connaissent l’art de la torréfaction sur le bout des doigts, tout comme leurs cacaos. De ce savoir naissent des créations uniques. Ainsi, la haute teneur en cacao de ce Crazy 88 Soma passerait inaperçue lors d’une dégustation à l’aveugle. Un assemblage à comparer à un autre de leurs blends, mais cette fois en 100%, l’Arcana. Alors, ne vous fiez pas aux noms inattendus de ces tablettes et laissez-vous tenter.

La note du sommelier
Tout comme avec les whisky ou les vins, les assemblages, ou blends en anglais, me laissent souvent sur ma faim. Nombreux sont les producteurs qui jouent ainsi la carte de l'uniformité pour créer des produits standardisés. Force est de constater que ce genre de contre-exemple me donne complètement tort et surtout envie de découvrir d'autres pépites de ce genre.