Jus de mucilage, qu’est-ce que c’est ?

Jus de mucilage de cacao.

Du cacaoyer, on connaît surtout le chocolat et par extension les fèves de cacao utilisées pour le fabriquer. Le mucilage est le nom de la chair fruitée qui entoure les fèves de cacao contenues dans la cabosse. Ainsi, le jus de mucilage est simplement le jus du fruit du cacaoyer. On l’appelle aussi parfois jus de cacao. Fin de l’histoire ? Pas vraiment, car si une écrasante majorité des consommateurs occidentaux connaît le chocolat, ces mêmes personnes n’ont pour la plupart jamais goûté le jus de fruit du cacaoyer.

Jus de fruit frais

Paradoxalement, de nombreux cultivateurs de cacao connaissent les saveurs de la pulpe de cacao, mais n’ont pas goûté de chocolat. S’il est difficile d’acheminer du chocolat dans une plantation tropicale sans le faire fondre, l’inverse est aussi vrai. En effet, dans ces conditions, les cabosses fermentent rapidement après leur récolte. C’est pourquoi, le jus extrait du mucilage se boit peu après avoir été pressé.

De même, du fait qu’il fermente rapidement, le jus de mucilage est à la base de plusieurs alcools de cacao. Attention, ces alcools sont à distinguer des liqueurs aromatisées au chocolat que nous connaissons dans les pays plus nordiques. Des variations gustatives à découvrir dans cet article sur les autres usages du cacao.

Cabosse ouverte avec ses fèves de cacao encore dans le mucilage.
Cabosse ouverte avec ses fèves de cacao encore dans le mucilage. Crédit : Keith Weller, USDA ARS via Wikipedia.

Où trouver du jus de mucilage pasteurisé ?

Étonnement, si une partie du mucilage est conservée durant la fermentation des fèves, une bonne partie de la pulpe devient un déchet. C’est ce constat qui a motivé l’entreprise Koa a valoriser cette matière. Comment ? En pressant le cacao frais sur le lieu de la récolte. Grâce à des panneaux solaires rendant l’installation autonome en énergie, le jus de fruit frais récolté peut être directement pasteurisé sur place. De plus, le procédé préserve les fèves qui peuvent toujours servir à produire du chocolat. Cerise sur le gâteau, les paysans gagnent le prix de leur récolte de fèves, ainsi que du jus. Ainsi, leurs revenus augmentent.

D’autres entreprises commercialisent du jus de cacao pasteurisé de façon plus classique via des usines dédiées. En outre, localement, il est parfois possible de trouver du jus de cacao réfrigéré, mais c’est surtout fraîchement pressé qu’il est proposé lorsque non pasteurisé.

Quel est le goût du jus de mucilage de cacao ?

Fruit tropical, le cacao est riche en goût et en sucre. De nombreuses personnes le comparent au litchi, probablement du fait qu’elles connaissent de cette référence. Toutefois, la saveur est généralement plus complexe, allant de touches de fruits exotiques à quelque chose de floral et sucré rappelant effectivement le litchi. S’il était possible de comparer les jus de différentes variétés de cabosses, la palette gustative serait probablement bien plus grande.

Sous nos latitudes, ce qui surprend, c’est l’absence d’acidité ; un goût souvent associé à de nombreux fruits tropicaux. De même, la texture du jus est plus épaisse que celle d’un jus de pomme tout en restant fluide. Décidément, le cacao n’a pas finit de nous surprendre !

Et vous, avez-vous déjà bu du jus de mucilage de cacao ? Qu’en avez-vous pensé ?

Crédit image principale : Felchlin. Droits réservés.

Comment sourcer le cacao ?

Sourcer le cacao sur la place de Chuao au Venezuela.

Sourcer son cacao, une tâche dont on parle peu lorsqu’il est question de chocolat bean-to-bar. Pourtant, fabriquer de la fève à la tablette implique de se procurer du cacao. Si certains artisans, surtout dans les pays producteurs de cacao, disposent de leur propre plantation de cacaoyer, la majorité doit l’acheter aux planteurs. Dès lors, plusieurs options se présentent. Rencontrer et acheter directement aux paysans, passer par une coopérative ou se fier à un intermédiaire, aussi appelé sourceur. Quel est le meilleur choix ?

Sourcer du cacao directement

Dans un esprit d’authenticité, la tentation de se fournir directement auprès des planteurs est grande. Toutefois, obtenir du cacao à la source présente de nombreux défis. Premièrement, d’un point de vue logistique, les petits producteurs ne disposent que rarement des ressources pour envoyer les fèves. Deuxièmement, la plupart d’entre eux ne fait pas fermenter et sécher son propre cacao. Ils confient souvent ces tâches aux coopératives. Finalement, les petites plantations n’arrivent pas à fournir une quantité et une qualité de cacao suffisante pour un chocolatier. Sans compter l’épineuse question de savoir pourquoi privilégier telle petite exploitation à telle autre…

Pour indiquer la provenance du cacao à l’échelle de la plantation, les artisans obtiennent leur fèves soit d’une coopérative, soit d’un grand propriétaire. Ce dernier cas ne représente pas l’écrasante majorité des planteurs de cacao. C’est pourquoi, la traçabilité fréquemment prônée se heurte aux limites de la précarité du terrain. De même, l’artisan qui se rend sur le terrain va souvent rencontrer des cacaoculteurs individuels plus aisés ou ayant d’ores et déjà des meilleurs contacts avec l’extérieur.

Sourcer son cacao soi-même ne met donc pas à l’abri de perpétuer les inégalités présentes dans la filière. De plus, les artisans chocolatiers ne disposent que rarement de l’expérience de terrain et du temps pour comparer différentes sources de cacao. Il leur est difficile de s’assurer de la légitimité du discours de leurs interlocuteurs en termes de durabilité et de conditions d’exploitation. Toutefois, en y consacrant du temps et souvent en se spécialisant dans un région, comme Qantu avec le Pérou, l’expérience peut être concluante.

Alain et Emile, les deux cofondateurs de Carrack Chocolat.
Alain et Emile, les deux cofondateurs de Carrack Chocolat, avec leur précieux cacao.

Passer par un ou plusieurs intermédiaires

Les coopératives constituent souvent un bon compromis. En effet, ces structurent regroupent plusieurs producteurs qui sont souvent à l’origine du groupement. Cette méthode permet souvent de répartir les bénéfices de façon plus équitable au sein de la communauté. De plus, les récoltes groupées permettent de trier les fèves par niveaux de qualité pour garantir un approvisionnement plus régulier. Dépendamment de la taille de la coopérative, la notion de terroir reste parfaitement pertinente. De même, les conditions de récolte restent très similaires, notamment en termes de calendrier. Parler de millésime ou de même récolte est tout à fait légitime.

Toutefois, les producteurs bean-to-bar curieux de travailler des origines et des profils aromatiques très différents se tournent souvent vers des sourceurs. Certains de ces intermédiaires se spécialisent dans le fait de parcourir les régions productrices de cacao à la recherche de cacao. D’autres se spécialisent dans une région ou un pays, souvent dont ils sont originaires. Les intermédiaires se fournissent aussi auprès de coopératives et de grands propriétaires. Dans les deux cas, ces intermédiaires recherchent et s’assurent de la constance de la qualité du cacao. Un travail précieux qui peut éviter des déconvenues et des pertes financières non négligeables.

Trouver un sourceur demande également un investissement en termes de temps. En effet, il s’agît de trouver un intermédiaire de confiance pour s’assurer que les engagements sont tenus. Mieux, une relation privilégiée permet aussi d’obtenir des lots de fèves rares ou d’une origine très demandée. Un bon sourceur sera aussi transparent. Il expliquera lorsqu’il fait lui-même appel à un intermédiaire local ou pourquoi il vaut mieux éviter certains cacaos.

Cacao de la coopérative UTKKU proposé par Silva Cacao
Sourcer le cacao de la coopérative UTKKU au Pérou ? Rien de plus facile avec le sourceur Silva Cacao. DR.

Quelle est la meilleure méthode ?

Lorsqu’un producteur de chocolat débute, il a tout intérêt à commencer par du cacao très commun. En plus de faciliter l’approvisionnement, ce choix permet d’apprendre à faire le chocolat plus facilement. En effet, cette méthode permet de comparer son travail à celui des autres. Un excellent moyen pour évaluer sa production et créer son propre style, tout en comprenant le potentiel aromatique d’un cacao. De même en s’approvisionnant directement auprès de planteurs connus ou de sourceurs reconnus, il est aussi plus facile de comprendre ce qui nous convient en termes de logistique et de relations humaines.

Plus tard, lorsqu’il souhaite se procurer du cacao moins connu ou plus rare, l’artisan a intérêt à procéder au coup par coup. En effet, une récolte peut s’avérer exceptionnelle, une livraison facile, un contact aisé, mais c’est dans la durée que la fiabilité se révèle. En outre, il s’agît aussi d’apprivoiser un nouveau cacao. Il arrive fréquemment que les artisans qui proposent trop d’origines différentes dans leur assortiment de chocolats, trop rapidement, n’en maîtrisent pas complètement les subtilités. Une erreur souvent observée chez les chocolatiers « classiques » qui se mettent au bean-to-bar ou chez ceux disposant de beaucoup de moyens.

Finalement, sourcer le cacao est un apprentissage, tout comme le torréfier ou peaufiner sa recette. Alors, n’hésitez pas à mettre en avant ce savoir-faire et jouez la carte de la transparence auprès de la clientèle.

La note du sommelier
Saviez-vous qu'en plus d'être un défi, le fait de se procurer son propre cacao est aussi un dédale administratif ? En effet, pour l'importer, il est nécessaire de s'assurer qu'il répond aux normes sanitaires et douanières. Ces exigences signifient qu'il est souvent nécessaire de le faire analyser par un laboratoire agréé, de trouver les bons interlocuteurs dans l'administration et obtenir les bons papiers. Sinon, le risque est de voir la marchandise bloquée, voire détruite par les douanes... Le sourceur se chargeant de ces démarches, l'achat du cacao est d'autant plus simple.

Image principale : Place de l’église de Chuao au Venezuela, particulièrement réputé pour son cacao, crédit Wikipedia

Pourquoi le prix du cacao a-t-il tant augmenté ?

Le négoce du prix du cacao.

La nouvelle a défrayé l’actualité du printemps 2024 : le prix du cacao a explosé. Stagnant durant des années à un peu plus de 2’000 dollars américains la tonne sur les marchés internationaux, le cours a commencé à augmenter en 2023. Fin avril 2024, il culminait à plus de 12’000 dollars. Une envolée spectaculaire, sans précédents. Aujourd’hui redescendu, le cours reste à près de 7’500 dollars, mais ne semble pas s’effondrer pour autant.

évolution du prix du cacao ces 10 dernières années
Évolution du prix du cacao ces 10 dernières années. L’envolée du printemps 2024 est impressionnante

La frénésie de l’actualité étant passée, je vous propose une analyse a posteriori. De quoi comprendre les enjeux en présence et de se faire une idée quant à l’évolution future possible. De quoi mieux comprendre nos choix en tant que consommateurs, mais aussi des pistes pour les producteurs qui souhaitent mieux communiquer leurs choix de production.

Plusieurs facteurs

Le prix du cacao dépend de plusieurs facteurs. La récolte et la demande sont les éléments de base qui fixent le prix sur les marchés internationaux. La consommation de chocolat globale est difficile à estimer de façon fiable. Toutefois, les importations de cacao par les pays producteurs de chocolat ne diminuent pas, au contraire. A l’inverse, la production mondiale de cacao reste relativement stable. A elle seule, cette situation explique une tendance à la hausse du prix du cacao.

récolte mondiale de cacao ces dernières années
Récolte mondiale de cacao de ces dernières années présentée par Chocosuisse.

Malgré tout, l’envolée ne s’explique pas par cette hausse régulière et mesurée. En effet, le prix du cacao est influencé par plusieurs autres paramètres tels que les conditions climatiques, le coûts des matières premières (transport, intrants pour la culture), la concurrence entre les principales entreprises de commerce de cacao, ou encore les prix fixés par les acteurs étatiques, notamment en Afrique de l’Ouest. Démêler ces facteurs demande une analyse plus poussée.

A qui profite l’augmentation du prix du cacao ?

Comme souvent, pour comprendre une situation, il est intéressant de voir à qui celle-ci profite. Dans le cas du cacao, les producteurs produisant la majorité du cacao mondial se situent au Ghana et en Côte d’Ivoire. Dans ces deux pays, les paysans vivent pour la majorité dans une pauvreté extrême. Pire, ils tendent plutôt à gagner moins avec l’augmentation du coût de la vie et en particulier du prix des intrants – engrais, pesticides – qu’ils utilisent.

Pourtant, les multinationales de la chimie ne sont pas à blâmer pour l’augmentation du prix du cacao. D’ailleurs, leur valeur boursière n’a pas suivi l’augmentation de celle du cacao. En effet, des organismes liés à l’État fixent, le cours du cacao en Côte d’Ivoire et au Ghana. Ainsi, le prix du sac de cacao en bord de champ n’a quasiment pas changé pour le producteur. Ce n’est donc pas lui qui voit la couleur de la pluie de billets verts échangés sur les marchés internationaux. En revanche, les instances étatiques qui transfèrent le cacao aux acheteurs internationaux, elles, empochent une marge confortable. Ont-elles pour autant créé cette situation ? Probablement pas outre mesure. La production mondiale de cacao dans son ensemble tend à se consolider et des acteurs comme l’Équateur jouent un rôle de plus en plus important.

De même, paradoxalement, les multinationales du cacao ne profitent pas particulièrement de ces augmentations. Au contraire, dans un premier temps, elles tentent de retarder la répercussion du prix de leur matière première pour conserver un avantage concurrentiel. Une stratégie temporaire, qui ne sera pas tenable à terme si les prix se maintiennent plus haut qu’auparavant.

Un coupable bien connu

Finalement, l’augmentation du prix du cacao vient surtout de la crainte d’une diminution significative de la production en Afrique de l’Ouest. Donc d’une diminution de l’abondance de cacao pas cher. Ce manque de productivité est grande partie provoqué par le climat. En effet, le phénomène cyclique de La Niña apporte plus d’humidité en Afrique de l’Ouest. Trop d’humidité et le cacaoyer produit moins. Mais, avec le réchauffement climatique, ce phénomène s’amplifie, car l’air emmagasine plus d’humidité, et influence d’autant plus les rendements.

Influence de la Nina sur le prix du cacao
Les phases d’El Niño en rouge et de La Niña en bleu. Données : National Oceanic & Atmospheric Administration NOAA. Graphique : MétéoSuisse.

Quel impact sur le consommateur du prix du cacao ?

En termes de conséquences, l’augmentation du prix du cacao se répercute de différentes façons. Si l’impact exact sur le consommateur est encore peu clair, il semble difficile d’imaginer que les augmentations ne soient pas au moins en partie répercutées.

L’augmentation du prix du chocolat industriel serait en partie une bonne nouvelle pour les artisans. En diminuant en partie l’écart de prix avec leurs produits, les consommateurs seraient plus incités à comparer les rapports qualité-prix relatifs. Toutefois, attention aux effets indésirables. D’une part, les prix des artisans peuvent aussi augmenter. D’autre part, en prenant le parti d’afficher le prix payé au producteur de cacao, donc plus bas que celui du marché international, le risque est de laisser croire aux clients que la marge revient à l’artisan, ce qui n’est pas le cas. Il est donc indispensable de communiquer clairement en comparant avec le prix reversé au producteur habituellement.

Et les producteurs de cacao ?

Inversement, les producteurs de cacao ressentent déjà les conséquences de ces augmentations, mais de façon inattendue. Ainsi, avec un prix contrôlé par l’État, la tentation de passer par le marché noir est grande. Un choix qui réduit à néant les programmes de lutte contre le travail des enfants dans les plantations et la revalorisation du travail des femmes, basés sur les contrôles de l’ensemble de la filière. Similairement, de nombreuses coopératives paysannes à travers le monde peinent à garder leurs paysans sociétaires qui préfèrent vendre au prix du marché libre, plus attractif, mettant en péril les schémas de mutualisation qui permettent de construire des écoles et des puits collectifs.

En plus d’être la manifestation des changements climatiques, la volatilité des marchés internationaux du cacao est surtout un élément d’incertitude majeur pour une population de producteurs déjà souvent touchée par l’extrême pauvreté. En tant que consommateurs et artisans, demander du cacao et du chocolat équitables est donc plus important que jamais.

Crédit photo principale : The Barry Callebaut Group.

Cacao cérémoniel, qu’est-ce que c’est ?

Cacao cérémoniel et cacao de cérémonie

Si les amateurs connaissent la cérémonie du thé au Japon ou encore la cérémonie du café en Éthiopie. Mais saviez-vous qu’il existe aussi du cacao cérémoniel ? Nouvelle tendance mercantile, retour aux origines du cacao, ou encore approche bien-être basées sur les vertus du cacao… Je vous propose de découvrir en quoi consiste le cacao cérémoniel.

Des origines à aujourd’hui

Les populations précolombiennes ont d’abord consommé le cacao sous forme de boisson. Fortement ritualisée et puis associée classes supérieures chez les Aztèques, cette consommation a même valu aux fèves de cacao de devenir monnaie d’échange. Broyé, le cacao était transformé en boisson et associé à différentes épices, dont la vanille. Force, courage, vitalité… les vertus du breuvage étaient nombreuses. Ces propriétés exceptionnelles vaudront même à Cortès de se faire servir du cacao en présence de Moctezuma dans une coupe d’or.

Alors appelée xocolatl, la boisson n’est ni sucrée, ni ne semble complètement convaincre gustativement les premiers Européens. Toutefois, le décorum et le rituel entourant le cacao marquent les esprits. C’est ainsi que le cacao entame sa conquête du monde en commençant par les cours européennes. Sa démocratisation transformera aussi les pays producteurs qui se tourneront de plus en plus vers une agriculture intensive du cacao. De même, l’influence européenne – encore ! –, vaudra à de certains pays producteurs de cacao de se détourner de leur tradition et d’adopter en partie la culture contemporaine du « chocolat chaud » et sucré. Un comble.

Aujourd’hui, avec le tourisme qui permet de découvrir les coutumes locales et le renouveau de la culture du cacao, un nouveau produit apparaît : le cacao cérémoniel. Du cacao « adapté » à la cérémonie du cacao. Reste une question majeure en suspens : qu’est-ce que cette cérémonie ? Historiquement, si les récits abondent, ils sont surtout rapportés par les Européens, donc avec certains biais, et occultent certains détails comme les quantités exactes. De même, les traditions locales actuelles évoluent et se teintent naturellement de nombreuses influences. C’est pourquoi, il n’existe pas de cérémonie « officielle », quoi qu’en disent certains gourous.

Recette pour la cérémonie du cacao

Ingrédients
- fèves de cacao (torréfiées ou non)
- fécule de maïs
- eau
- épices des Amériques (piment, poivre de Jamaïque, vanille)

Ingrédients optionnels
- autres épices (cannelle, gingembre, clous de girofle, etc.)
- sucre, miel, sirop d'érable, mélasse

Moudre les fèves pour en faire une pâte, diluer dans de l'eau chaude, épaissir avec de la fécule de maïs, assaisonner et sucrer selon préférences, fouetter pour faire mousser, déguster chaud, tiède ou froid selon envie.
Cacao cérémoniel
Cacao cérémoniel ou chocolat chaud ? Photo de Melody Zimmerman via Unsplash.

Les supposées vertus du cacao cérémoniel

Souvent associé à des pratiques ésotériques ou de bien-être, le cacao cérémoniel surfe sur la vague des « aliments santé ». Des affirmations à prendre avec circonspection, tout comme les antioxydants du chocolat, qui n’apportent de bénéfices que dans le cadre d’une alimentation équilibrée. De même, si la cérémonie se déroule dans un cadre propice à la détente, voire à la méditation, ses effets sur le stress seront bénéfiques. Mais il ne faut pas y chercher autre chose et en particulier des vertus curatives miraculeuses.

A ce titre, deux approches s’opposent : l’utilisation de cacao dit cru ou torréfié. L’usage de la variante « crue » préserverait plus de « bonnes » propriétés du cacao. Outre le fait que le cacao cru est malgré tout fermenté, donc chauffé à près de 45-50°C, certains arôme ne sont présent qu’après torréfaction et inversement. Il s’agît donc essentiellement d’une question gustative. De même, l’ajout ou non d’épices non-traditionnelles (voir recette ci-dessus) ou d’éléments sucrants fait couler beaucoup d’encre. Là encore, laissez-vous plutôt guider par le plaisir des sens. Un produit de qualité, sans conservateurs, vaut mieux que son pendant industriel.

Où trouver du cacao cérémoniel ?

Mais en fait… La recette parle de fèves de cacao, pas de cacao cérémoniel ! Flairant le bon filon, plusieurs producteurs commercialisent du cacao déjà prêt à l’emploi. C’est-à-dire de la pâte de cacao broyé, soit en pot, soit sous forme de…. tablette. Certains y ajoutent déjà des épices et/ou du sucre. D’autres laisse ce soin aux clients. Dans tous les cas, la préparation est à faire fondre dans de l’eau chaude, voire du lait. Vous trouvez aussi que cela ressemble étonnement à un chocolat chaud agrémenté d’épices ? Rien d’étonnant…

Reste le plaisir du rituel – encore et toujours ! – dont on aurait tort de se priver. A ce titre, tenter l’expérience soi-même vaut la peine. Achetez des fèves de cacao, faites les passer à la moulinette, affinez votre mélange et laissez la magie de l’effort et de la découverte vous emporter. Pour les fèves de cacao, de nombreuses épiceries en proposent, tout comme vos producteurs bean-to-bar préférés, qui vous permettront d’en obtenir de meilleure qualité en terme de goût.

Et vous ? Quelle est votre recette personnelle préférée ? Partagez vos découvertes en commentaire.

Crédit photo principale : Pablo Merchán Montes via Unsplash.

Y aurait-il du chocolat sans la disparition des dinosaures ?

Dinosaure gâteau chocolat

La question semble ridicule. Chocolat, dinosaures : impossible d’envisager les deux ensemble. Bien sûr, si les dinosaures étaient restés les maîtres de la planète, les humains ne seraient pas apparus – en tous cas sous leur forme actuelle. Donc, nous n’aurions pas été là pour fabriquer le chocolat. Fin de l’histoire. Enfin, pas vraiment…

L’impact météoritique qui a entraîné la disparition des dinosaures a provoqué de nombreuses répercussions sur notre planète. En effet, en décimant de nombreuses espèces animales et végétales, de nombreux écosystèmes ont été complètement remodelés. Ainsi, il se pourrait que la catastrophe ait bénéficié d’une façon inattendue au cacaoyer…

Vin, chocolat et dinosaures, une même histoire ?

L’enquête commence en Amérique du Sud, avec une équipe de paléobotanistes. Un chercheur américain, Fabiany Herrera, est à la recherche d’un fossile aussi mythique qu’insaisissable. Celui du grain de raisin… Difficile à trouver au milieu des roches de par sa taille, précieux, car permettant de retracer l’histoire de cette plante emblématique pour l’humain qu’est la vigne.

En 2022, Fabiany et ses collègues font une percée dans les Andes colombiennes. Ils y découvrent un fossile particulièrement ancien. Pour confirmer qu’il s’agît bien de raisin, c’est au scanner médical qu’ils sondent leur trouvaille pour en révéler la structure. Poursuivant leurs efforts, ils parviennent à identifier neuf nouvelles espèces de raisin à travers l’Amérique du Sud, remontant entre 19 et 60 millions d’années. Ce travail leur permet de brosser le tableau de l’évolution de cette plante sur ce continent.

Ainsi, ils expliquent qu’avec la disparition des dinosaures, les forêts changent drastiquement. La croissance des arbres n’est plus ralentie par ces géants qui façonnaient les forêts à leur passage. Elles deviennent de plus en plus denses. C’est pourquoi, la lumière devient aussi de plus en plus difficile à atteindre pour de nombreuses plantes. A défaut de pousser assez vite, certaines espèces développent de nouvelles stratégies . Ainsi, la vigne grimpe pour gagner en hauteur et en exposition à la lumière. De même, ses fruits sont facilement disséminés grâce aux oiseaux, ce qui lui permet de coloniser de larges régions.

Fossile de Florissantia quilchenensis
Fossile de Florissantia quilchenensis, une fleur de la même famille que le cacao. Crédit Wikipedia.

Et le chocolat alors ?

Ce changement d’environnement a aussi certainement affecté le cacao préhistorique et pourrait expliquer les caractéristiques actuelles des cacaoyers. En effet, malgré le fait qu’il soit une plante tropicale, le cacaoyer n’est pas adapté aux environnements en plein soleil. Bien qu’atteignant 12 à 15 mètres à l’état sauvage, sa hauteur n’est pas suffisante pour concurrencer les espèces plus grandes. C’est donc un arbre ayant besoin de conditions ombragées. Un héritage peut-être venu de ces forêts sans dinosaures.

Pour compenser la manque de lumière, le cacaoyer tire du sol une partie de l’énergie dont il a besoin. C’est pourquoi il nécessite des sols riches. Ces caractéristiques en font un arbre fruitier peu adapté à l’exploitation intensive. Ainsi, en monoculture, il épuise les sols, qui après quelques années ne sont plus fertiles. De même, pour l’exploiter, il aura fallu un important processus de sélection pour les rendre plus résistant au soleil direct. Mais si la variété industrielle, appelée CCN51, permet de planter du cacao sur des parcelles défrichées, elle ne répond pas aux problèmes de l’épuisement des sols. Sans mentionner les ravages liés aux parasites et autres champignons qui prolifèrent sur ces parcelles à faible biodiversité, et rendant les cultivateurs dépendants des fongicides et des engrais.

Finalement, les meilleurs cacaos sont issus de l’agroforesterie où la symbiose avec d’autres espèces permet un bon équilibre. Au-delà des aspects environnementaux, ces cacaos sont aussi souvent plus riches d’un point de vue gustatif. De quoi nous encourager à cultiver l’héritage légué par un certain astéroïde, qui, il y a environ 65 millions d’années, changeait la donne pour le cacao… et les humains.

Crédit photo image principale : Silvana Mool.

Pourquoi torréfier le cacao pour faire du chocolat ?

pourquoi torréfier le cacao

Parmi les différentes étapes de production du chocolat, la torréfaction est souvent citée en exemple. Deux raisons à cela. Premièrement, la plupart des producteurs de chocolat exercent leur métier loin des plantations de cacao. Ils apportent leur savoir-faire seulement à partir de cette étape. Deuxièmement, se dire chocolatier-torréfacteur permet de se distinguer des chocolatiers dits classiques, qui ne font que travailler du chocolat de couverture, sans transformer eux-mêmes le cacao. Mais, au fond, pourquoi torréfie-t-on le cacao ?

Besoin physico-chimique

Le fait de torréfier le cacao influence ses propriétés physiques et chimiques. D’une part, la torréfaction permet de décoller plus facilement la peau de l’amande de cacao pour ensuite s’en défaire. Faute de quoi la texture du chocolat changerait. Paradoxalement, et contrairement à ce que de nombreux torréfacteurs artisanaux pensent, la torréfaction ne baisse pas significativement le taux d’humidité des fèves. Ce taux est surtout tributaire du séchage des fèves dans le pays de production du cacao.

D’autre part, la torréfaction influence également les molécules du cacao. Elle a ainsi un effet sur son goût. Le phénomène à l’œuvre qui a le plus d’impact à cette étape s’appelle la réaction de Maillard. A distinguer de la caramélisation, cette réaction est typique des phénomènes de cuisson qui exhalent le goût et les odeurs des aliments. Dans le cas du cacao, cette étape va avoir plusieurs actions. Premièrement, elle change la couleur du cacao. Passant du brun clair au brun chocolat, la fève acquiert ainsi sa robe iconique. Deuxièmement, le goût gagne en intensité, notamment en astringence. En effet, les changements de concentration d’antioxydants jouent un rôle dans cette variation de couleur et de goût.

Cacao torréfié et cru
De gauche à droite, cabosse de cacao, cacao cru, cacao torréfié et torréfié sans sa peau. Crédit : Chansom Pantip.

Torréfier le cacao, une étape cruciale et un savoir-faire unique

Sur le papier tout semble clair. Pourtant, trouver l’équilibre est un savoir-faire qui demande beaucoup de pratique. Trop torréfié, le cacao devient amer, voire brûlé. Pas assez, il manquera d’intensité. Cette étape permet au chocolatier d’imprimer son style au cacao. Le processus est également plus complexe qu’il n’y paraît. Particulièrement sensibles, certains cacaos ne tolèrent pas plus de quelques dizaines de secondes d’écart avant d’être trop torréfiés.

La température, la durée, l’humidité de l’air, la taille et le type de fèves de cacao déterminent les caractéristiques précises de la torréfaction. Généralement, pour le cacao, la réaction de Maillard ne débute qu’au-delà de 100°C et est la plus effective au-dessus de 130°C. C’est pourquoi les torréfacteurs font souvent varier la température au fil du temps. Ils peuvent ainsi exprimer le meilleur du cacao, tout en s’assurant d’une torréfaction uniforme malgré la diversité relative des fèves. Une torréfaction plus légère exprime plus les arômes fruités du cacao, alors que plus forte, elle mettra l’accent sur les notes plus intenses et plus umami.

Tableau comparatif des différentes conditions de torréfaction de trois cacaos différents.
Tableau comparatif des différentes conditions de torréfaction de trois cacaos différents. Il est surtout intéressant de noter pour la 2e cacao, le changement significatif de composition en passant d’une torréfaction de 120° à 135°C. Crédit : Joanna Oracz & Ewa Nebesny.

Ainsi, lorsqu’un artisan indique un type de torréfaction — douce, intense —, voire une température et une durée, il ne trahit pas son secret. En effet, sans plus de précisions, il n’est guère possible d’en faire quoi que ce soit. En revanche, ce faisant, il met non seulement en avant son travail, mais il facilite la comparaison et la compréhension par le consommateur.

Cacao torréfié, cru ou pasteurisé

Le chocolat torréfié est souvent opposé au chocolat dit cru ou raw. Toutefois, si le cacao utilisé pour produire ces chocolats n’est pas à torréfié, cela ne signifie pas qu’il n’a pas été chauffé durant sa fermentation, puis pour être transformé en masse de chocolat liquide.

En revanche, les cacaos travaillés par les industriels sont rarement torréfiés. Plus souvent pasteurisés que torréfiés. En effet, pour se débarrasser des moisissures et des bactéries de ces cacaos, les entreprises chauffent brièvement les fèves à haute température, à plusieurs centaines de degrés. Si elle garantit la sécurité alimentaire du cacao, cette façon de faire détruit les composants les plus volatils qui font le goût subtil des chocolats artisanaux de qualité.

La note du sommelier
Poser des questions sur la torréfaction du cacao est un excellent moyen pour s'assurer que votre interlocuteur réalise bien lui-même son chocolat de la fève à la tablette. Avec le temps, vous pourrez aussi identifier quel style vous convient plus. 

Pour aller plus loin, notamment en se plongeant dans les détails techniques, cet article scientifique publié par deux chercheuses dans la revue European Food Research and Technology en 2018 regorge d'informations.

Pénurie de cacao : va-t-on manquer de chocolat ?

Pénurie de cacao et de chocolat

Selon le Robert, le luxe se définit comme un « mode de vie caractérisé par de grandes dépenses consacrées au superflu » ou autrement dit, le « caractère coûteux, somptueux (d’un bien, d’un service). » Une définition qui correspond bien à un produit qui est tout, sauf vital. Quoi qu’en disent certains amateurs de chocolat. Dès lors se pose une question aussi frivole que lancinante : s’il y a pénurie de cacao, risque-t-on de manquer de chocolat ?

Finitude de la quantité de cacao

La quantité de cacao produite dans le monde ces dernières années équivaut environ à 5 millions de tonnes selon la Plateforme suisse du cacao durable. Un chiffre qui ne veut pas dire grand chose pour les consommateurs que nous sommes. S’il faut environ un kilo de cacao pour une plaque de chocolat noir, cela signifie que la production mondiale permet d’en produire environ 5 milliards. Dans le faits, vraisemblablement plus du double pour tenir compte des chocolats avec moins de cacao. Gigantesque, non ? Néanmoins, rapporté à la population globale, cela représente environ une tablette par personne et par an. Un chiffre plus si extravagant.

Mais alors, se dirige-t-on vers une pénurie de cacao et de chocolat ? Non. La tendance de ces dernières années est à une augmentation de la production mondiale de cacao. La production a plus que doublé ces 20 dernières années. Toutefois, il n’est pas possible de se fier à cette dynamique pour faire des prévisions fiables à moyen et long terme.

Diminution de la production ne signifie pas pénurie de cacao

Les effets du changement climatique impactent de nombreux domaines de l’agriculture, en particulier en milieu tropical. La culture du cacao ne fait pas exception. De même, en Afrique où est produite la majorité de cacao bon marché, le vieillissement des agriculteurs et le manque de relève dans les plantations fait craindre une baisse de production supplémentaire.

Cette diminution de la productivité est et sera en partie compensée par l’émergence de nouveaux acteurs dans d’autres pays. Ces initiatives voient le jour soit grâce à des entreprises privées, soit grâce au soutien étatique qui cherche à créer de nouvelles filières cacaoyères. Reste qu’à plus long terme, la productivité va s’amoindrir. Même s’il est aujourd’hui difficile d’estimer quel sera l’impact sur la production mondiale, une pénurie semble peu vraisemblable à moyen terme.

Faut-il en être rassuré ? Non plus, car avec la mondialisation, la consommation de cacao augmente. Si certains pays comme la Suisse en consomment moins, les marchés asiatiques tirent la tendance à la hausse. Il est donc probable qu’entre augmentation de la demande et berne de la productivité, à moyen terme, les prix augmenteront.

Pénurie de cacao, les producteurs mieux rémunérés ?

Cours du cacao à la bourse
Fin 2023 et début 2024, les cours du cacao à la bourse s’envolent. Faisant plus que doubler sur un an. Y a-t-il pénurie ?

La situation semble jouer en faveur d’une meilleure rémunération des producteurs de cacao. Un a priori qui n’est qu’en partie vrai. En effet, le prix de la bourse met un certain temps à se répercuter jusque sur le terrain. De même, les changements climatiques et sociaux vont obliger les cacaoculteurs à soit investir dans des variétés plus résistantes, soit à augmenter leur dépendance aux intrants chimiques, voire les deux. Leur niveau de vie et la pénibilité de leur travail ne vont donc pas forcément changer, au contraire. La source du problème réside dans notre consommation d’un cacao peu cher, au prix dicté par les grands industriels. Le prix réel du chocolat devrait être bien différent de ce que nous connaissons.

Rareté des bons cacaos

Quid des chocolats dits bean-to-bar ? Leur filière mieux contrôlée est-elle le gage d’une sécurité de l’approvisionnement en cacao ? A court et moyen terme, très probablement. Reste que les effets liés au climat impacteront tout le monde et la hausse globale du nombre d’amateurs de chocolat augmente aussi le nombre d’amateurs prisant le bean-to-bar. La rareté et la demande dictent les prix, qui vont donc logiquement monter.

Si l’effet de correction des prix pour le consommateur occidental sera moindre dans le domaine du chocolat de qualité, il y a fort à parier que la différence pour les chocolats de grande consommation sera bien plus grande. Nous découvrirons alors ce que représente le coût réel du chocolat. Un tableau bien sombre, mais qui laisse encore de la place à l’espoir. Aujourd’hui, il est encore possible de changer le cours des choses en minimisant l’impact de nos activités et celui de nos sociétés sur le climat. Bonne nouvelle : chaque tablette de chocolat compte, alors mangez futé !

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Quel pays produit le meilleur cacao ?

Quel pays produit le meilleur cacao

Les publicités vantent souvent l’origine du chocolat ou plutôt de son cacao. Mais alors… quel pays produit le meilleur cacao ? Peut-on choisir son chocolat en fonction du pays d’origine du cacao ou faut-il se fier à d’autres critères ? Je vous propose de répondre à ces questions pour vous permettre de mieux choisir vos chocolats, tout en évitant les pièges du marketing.

Quels pays produisent du cacao ?

Deux pays assurent plus de la moitié de la production mondiale de cacao : la Côte d’Ivoire et le Ghana. Toutefois, cette masse est essentiellement destinée à la production de chocolat industriel. En réalité, la liste des pays qui produisent du cacao transformé en chocolat est bien plus grande !

Carte des pays producteurs de cacao
Carte des pays producteurs de cacao. Source : Plate-forme suisse du cacao durable

En plus des pays ci-dessus, il faut citer l’Angola, l’Australie (Queensland), le Belize, le Bénin, la Birmanie, le Burundi, Le Cambodge, les États-Unis (Hawaï), la Jamaïque, le Kenya, le Laos, le Malawi, la République centrafricaine, le Rwanda, le Salvador, Sao Tomé, Taïwan, la Zambie, le Zimbabwe, ainsi que de nombreuses îles du Pacifique et des Caraïbes. Bref, quasiment chaque pays bénéficiant d’un climat tropical.

Y a-t-il des pays qui produisent du meilleur cacao que d’autres ?

Si la production de cacao se situe surtout en Afrique, l’arbre fruitier est originaire du bassin amazonien, en Amérique du Sud. Encore aujourd’hui, cette filiation vaut une meilleure réputation aux cacaos d’Amérique du Sud. Pourtant, alors que certains pays comme l’Équateur produisent actuellement presque 10% du cacao mondial, il est évident que toutes les fèves du pays ne se valent pas en terme de qualité.

En réalité, dans le cas des chocolats produits à partir de cacao d’Amérique du Sud, il vaut mieux prêter attention à la mention soit des variétés de cacao précisément identifiées, soit des origines géographiques très précises. En effet, un type de cacao très précis est généralement synonyme de la provenance d’une plantation ou d’une région spécifique. Cette traçabilité est de bon augure quant à la qualité du travail du cacao. A contrario, les fèves de moins bonne qualité finissent souvent mélangées avec d’autres. Ainsi, elles peuvent se perdre sous l’appellation très vague d’un seul pays.

De même, certains pays considérés comme quelconques en terme de qualité de cacao réservent de belles surprises. Ainsi, au Ghana, la ferme Sronko produit un cacao particulièrement fruité, interprété notamment par Garçoa de Zurich.

Et les régions ?

S’il est impossible de déterminer quel pays produit le meilleur cacao, qu’en est-il de régions plus spécifiques ? Si certaines semblent plus intéressantes de part leur variété locale de cacao, gare aux généralités ! Ainsi au Pérou, dans la région de Curimana, la coopérative Comité Central con Desarollo al Futuro de Curimana produit un excellent cacao d’une variété… commerciale. Une fois encore, la qualité du travail à l’échelle des producteurs fait la différence.

Finalement, il faut également distinguer le travail du cacao dans la plantation de l’interprétation des fèves de cacao par le chocolatier-torréfacteur. Selon le talent et les affinités des chocolatiers, un même cacao donnera un chocolat très différent. De même, les préférences personnelles et l’envie du moment feront varier les préférences en termes de chocolats et de cacaos. Parler d’un pays qui produit le meilleur cacao du monde n’a donc pas de sens.

La note du sommelier
Personnellement, je choisis rarement un chocolat en fonction de l'origine de son cacao. A deux exceptions près. Premièrement, lorsque la région ou la plantation me rappellent un bon souvenir. Deuxièmement, lorsque je ne connais pas encore l'origine en question. Curiosité oblige. Récemment, j'ai ainsi découvert la richesse des origines présentes au Brésil. A noter aussi qu'il existe des modes, de nouvelles "destinations", qui gagnent en visibilité sur la scène bean-to-bar grâce à un prix ou un reportage. Si l'original déçoit rarement, les suivants sont très variables en terme de qualité.

Crédit image principale : Les chocolats de Nicolas / Macrovector / Wikicommons

Quel est l’impact du chocolat sur l’eau, une ressource menacée

Quel est l'impact du chocolat sur l'eau

Le climat occupe régulièrement les discussions des amateurs de chocolat. Que ce soit en raison de la déforestation liée à la culture du cacao ou du CO2 émis par son transport, l’impact est une évidence. Depuis peu, les discussions intègrent également une nouvelle dimension : l’impact du chocolat sur l’eau. Quelle est son utilisation des ressources en eau ? Le constat semble sans appel : le chocolat ferait partie des pires élèves.

Mesurer la quantité d’eau nécessaire à la production d’aliments permet de comprendre les conséquences de nos habitudes de consommation. Ainsi, un fruit ou un légume qui pousse dans une région désertique consomme de l’eau d’irrigation. De même, un animal boit de l’eau, mais mange aussi souvent un fourrage qui pousse aussi grâce à l’irrigation.

Dès lors, qu’en est-il réellement pour le chocolat ? De quels éléments faut-il tenir compte ?

L’impact du chocolat sur l’eau

Régulièrement décriée, la viande rouge caracole en tête des classements, avec près de 15’000 litres d’eau nécessaires pour produire un kilo. Une valeur à comparer au 300 litres utilisés en moyenne pour produire un kilo de légumes. Quid du chocolat ? Avec 17’000 litres par kilo, l’impact du chocolat sur l’eau est phénoménal… Et encore, il s’agît d’un chocolat noir avec seulement 60% de cacao. En effet, à 100%, on frôle les 24’000 litres le kilo.

S’il semble que la quantité consommée de chocolat soit plus faible que celle de viande, ces valeurs sont malgré tout énormes. Mais d’où viennent ces chiffres ? Mis en avant par l’association Water Footprint Network, ils sont tirés d’une étude scientifique. Sérieux, ce travail est disponible ouvertement et s’appuie sur des données publiques, notamment d’agences onusiennes. De plus, il a été publié dans une revue scientifique avec comité de relecture et est abondement cité.

Impacts de l’eau verte, bleue et grise

Toutefois, il faut regarder la situation plus en détails. En effet, les chercheurs mentionnent trois types d’empreinte d’eau : verte, bleue et grise. La verte est l’eau provenant des précipitations et directement utilisée par les plantes. Elle est particulièrement importante pour les produits agricoles. La bleue est l’eau prélevée des stocks souterrains ou de surface, par exemple pour l’irrigation. La grise est l’eau nécessaire pour assimiler les polluants, notamment les fertilisants.

Dans le cadre du chocolat, l’essentiel de l’impact hydrique se joue au niveau de l’eau dite verte, soit celle apportée par la pluie pour arroser les cacaoyer ou la canne à sucre. Ainsi, 98% sont verts et les 2% restants se divisent à part égales entre eaux bleue et grise. Le cacao poussant dans des régions tropicales, cette eau de pluie fait partie du cycle naturel de l’écosystème dans lequel l’arbre se trouve. Fin de la discussion, le problème n’en est pas un… non ?

Pas vraiment. Effectivement, l’essentiel du cacao transformé en chocolat provient de cultures intensives. La déforestation qui en découle affecte l’écosystème, qui devient plus fragile, notamment en termes de ressources en eau. Cette situation est particulièrement visible sur la carte de l’impact de l’eau verte qui illustre l’article scientifique.

Carte mondiale de l'impact des cultures sur l'eau
En haut à gauche, la carte de l’impact de l’eau verte illustre bien les disparités entre pays cultivateur de cacao. Ainsi, en Afrique, le Ghana et la Côte (cercle) d’Ivoire subissent plus fortement l’eau verte, qu’un pays comme le Venezuela (rectangle) en Amérique du Sud.

Une situation qui évolue

Le choix d’un chocolat produit à partir de cultures de cacao durables est donc primordial. Malgré tout, il faut tenir compte d’inconnues supplémentaires. En effet, l’étude citée date de 2010 et examinait la période météorologique de 1996 à 2005. Compte tenu des effets rapides du changement climatique, les conclusions peuvent elles aussi changer. Ainsi certaines régions de l’Amazonie, pourtant connues pour leur climat tropical humide, souffrent aujourd’hui de sécheresse.

De même, ceux qui souhaitent faire pousser du cacao en laboratoire ne résoudront pas cette problématique. L’impact du chocolat sur l’eau ne serait que déplacé. Finalement, il s’agît non seulement de manger mieux, mais aussi moins. Le but est de respecter les ressources naturelles de notre environnement. C’est-à-dire l’écosystème dans lequel pousse le cacao.

Image principale tirée d’Abstral Official.

Peut-on faire du chocolat sans cacao ?

Chocolat sans cacao

La question peut sembler saugrenue. Pourtant, elle n’est pas anodine : peut-on réellement faire du chocolat sans cacao ? Entre chocolat de laboratoire et produits naturels de substitution, le chocolat semble être menacé de toutes parts. Qu’en est-il réellement et connaissez-vous les alternatives ? Découvrez les dernières tendances dans le domaine.

Cupaçu et les autres cousins du cacao

Si le cacao est roi, il n’est pas le seul de la famille des arbres fruitiers theobroma. Ses cousins donnent également des fruits intéressants. Le theobroma grandiflorum produit le cupuaçu et le theobroma bicolor le mocambo. De façon similaire au cacao, un artisan peut transformer ces fruits en tablettes. Curieux ? Je parle du goût de ces produits au cupuaçu et au mocambo dans cet article.

Malgré tout, il faut rappeler que, légalement, pour être appelé chocolat, une tablette doit contenir du cacao. Ces créations n’en sont donc pas techniquement parlant. Au-delà de ces considérations réglementaires, ces produits sont une option intéressante pour découvrir un « chocolat » sans cacao. Bien que peu répandus, ils tendent à gagner en visibilité auprès des adeptes de nouvelles tendances.

Le café pour du chocolat sans cacao ?

Le chocafé est un autre prétendant au titre de tablette sans cacao. Avec cette approche, l’idée consiste à remplacer la pâte obtenue à partir des fèves de cacao par de la pâte de grains de café. Ainsi, en Suisse, Coffola propose une tablette de ce genre. Le tendance existe également dans les pays producteurs de cacao et de café, comme par exemple en Équateur. Là-bas, on peut citer le producteur bean-to-bar Mashpi qui réalise une création de ce type.

Tablette de café de Mashpi - coffee chocolate bar - un concurrent du coffola
Tablette de café de Mashpi – coffee chocolate bar – un concurrent du coffola pour du chocolat sans cacao… ou presque. Crédit : Mashpi Chocolate.

Quoi qu’il en soit, dans les deux cas, le résultat contient du cacao. En effet, c’est le beurre de cacao qui sert de liant pour assurer la texture de la pâte de café. D’ailleurs, le rôle de cet ingrédient n’est pas à négliger au niveau gustatif. Dans le cas de Mashpi, l’utilisation du beurre de cacao non désodorisé et provenant de leur propre plantation ajoute une grande richesse sensorielle. Attention, les personnes sensibles préféreront éviter ces produits dopés à la caféine.

Cacao de laboratoire

Mais alors, n’existe-t-il pas de chocolat sans cacao? Commercialement non, mais la donne pourrait changer. En effet, l’Université des sciences appliquées de Zurich (ZHAW) a produit une tablette de chocolat dont le cacao n’a pas vu de cacaoyer. Les chercheurs utilisent des fèves de cacao — la nature reste irremplaçable — pour en multiplier les cellules dans une cuve et ainsi obtenir la matière première pour leur chocolat. Un procédé décrit dans cet article de Swissinfo.

Finalement, si ce test de faisabilité n’a pas vocation a remplacer la culture traditionnelle du cacao, il a le mérite de tenter de répondre à un enjeu essentiel du chocolat industriel, celui de l’impact environnemental de la cacaoculture. Autre point intéressant, il révèle le prix d’une tablette réellement produite en Suisse de A à Z : entre 15 et 20 francs… Certes, l’industrialisation du processus permettrait de faire baisser ce prix, mais on reste loin des références actuelles les moins chères.

Et vous, avez-vous déjà goûté ces alternatives ? Qu’en avez-vous pensé ?

La note du sommelier
Personnellement, si je n'ai pas goûté le chocolat de laboratoire, j'ai eu l'occasion de tester les autres alternatives. Les cousins du cacao m'ont le plus convaincu en terme de richesse gustative. Leur texture et leurs notes gourmandes m'ont clairement donné envie d'en reprendre. Similairement, j'ai trouvé le chocafé de Mashpi vraiment intéressant, mais ai certainement moins envie d'en consommer spontanément. A mon avis, le chocolat classique reste encore un must.